Le processus de développement des NTIC Maïmouna Sissoko-Touré Au cours des dix dernières années, les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication ont, avec un rythme timide mais régulier, gagné les pays au sud du Sahara. Ce secteur aujourd'hui en pleine expansion dans les pays occidentaux, notamment aux États-Unis, au Canada et en Europe, est en phase de devenir dans les pays du Sud, en particulier ceux d'Afrique, un véritable enjeu de développement social, économique et culturel. Assurément transversales, car touchant tous les domaines du développement (éducation, santé, environnement...), les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication pourraient-elles être pour les pays africains notamment pour le Mali, un outil de développement ? En tant qu'outil, elles ne peuvent naturellement pas occulter les vrais problèmes mais peuvent peut-être aider à les résoudre. Faut-il le rappeler ? En Afrique, 340 millions de personnes (soit la moitié de la population) vivent avec moins d'un euro par jour. Le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans y est plus élevé que partout ailleurs au monde et estimé à 140 pour 1 000. Le taux d'alphabétisation des plus de 15 ans est de 41 % et 58 % seulement de la population ont accès à l'eau potable [1]. Les priorités des pays du Sud restent donc le développement de ces secteurs de base qui constituent de véritables défis de développement économique. Le secteur de l'éducation qui est transversal de tous les autres secteurs peut fortement y contribuer. Car c'est à travers l'éducation et probablement elle seule, que nous apprenons à devenir de bons citoyens, à acquérir les compétences nécessaires au développement économique et social, à maîtriser les nouvelles techniques pour les autres secteurs de développement. L'éducation est par conséquent le moyen le plus efficace pour transmettre les compétences et connaissances indispensables pour maîtriser les enjeux du contexte socio-économique dans lequel nous évoluons. À condition toutefois de remédier à un certain nombre d'écueils. Nous nous heurtons en Afrique à des problèmes d'infrastructures, économiques, de politiques administratives et culturelles. Tant que ses problèmes ne seront pas étudiés avec efficacité et traités dans un contexte socio-économique, nous ne pourrons pas prétendre à des résultats allant dans le sens d'un développement durable. Données sur le Mali Le Mali est un pays situé au centre de l'Afrique de l'ouest. Sa population compte environ 10 millions d'habitants sur 1 241 000 km2 dans un environnement caractérisé au nord par la désertification et au sud par une dégradation de l'écologie. La grande majorité de la population vit en milieu rural à 80 %. Les sédentaires constituent 94 % de la population et les nomades 6 %. La population est composée de 51 % de femmes et de 49 % d'hommes. L'économie malienne est caractérisée par une forte prédominance des secteurs primaire et tertiaire qui fournissent plus de 2/3 du PIB et font vivre la plus grande partie de la population. Le Mali est un pays à vocation agropastorale. L'agriculture et l'élevage sont les principales activités de subsistance pour 82 % de la population et comptent pour 42 % du PIB. L'activité industrielle est peu développée et porte sur la transformation des produits agricoles. Le secteur tertiaire compte pour 41 % à 47 % du PIB (année 1998). L'activité dominante est le commerce qui progresse très rapidement dans les villes les plus importantes. La population croit de 3,7 % par an et est très jeune. 67 % ont moins de 25ans.Pour ces 67 %, les chances d'accéder à une éducation formelle ou non formelle sont minces. Sur le plan de l'énergie électrique, le taux de couverture national est de moins de 13 % ce qui n'est pas favorable au développement des Technologies de l'Information et de la Communication. Mais le Mali, depuis quelques années, a affiché une réelle volonté de développer le secteur des NTIC. En effet, en octobre 1996, ceci à travers l'engagement de l'ancien président malien Alpha Oumar Konaré, se tenait à Genève en Suisse, une rencontre internationale dont le thème était « l'Afrique et les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication », coparrainée par Guy Olivier, Second du Conseil d'État de la République du Canton de Genève. Au cours de cette rencontre, il a été défini pour les pays en voie de développement et notamment ceux d'Afrique, qu'ils doivent être les véritables acteurs actifs dans le processus global de circulation et de gestion de l'information sur les inforoutes de l'Information et de la Communication en Afrique . Chaque pays possède sa version. Pour le Mali, ANAIS est rattaché au gouvernement. À l'issue de cette rencontre, il a été créé un réseau appelé ANAIS sur Internet qui a comme objectif de promouvoir et de diffuser toutes les réalisations dans le domaine des Technologies de l'Information et de la Communication. Lors du Sommet mondial de la société de l'information à Genève en 2003, la volonté internationale de réduire la fracture numérique entre l'Afrique et le reste du monde s'est traduite par la création du fonds de solidarité numérique initié par le président de la république du Sénégal et qui entre dans les grandes priorités du Nepad. (Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique). Ce fonds a pour objectif de combler le fossé numérique entre l'Afrique et les pays développés. Pour y parvenir, le fonds entend mener de multiples actions de formations, d'équipements en ordinateurs et en infrastructures [2]. Le Mali, compte aujourd'hui entre 30 000 et 50 000 internautes [3], pour environ 11 millions d'habitants. Il faut noter que la plupart des internautes vivent dans la capitale alors que la capitale n'abrite qu'environ 1 million d'habitants. La majorité de la population vit en milieu rural où les conditions ne sont pas toujours réunies pour avoir accès à Internet à moindre frais. Néanmoins, en quelques années le coût de connexion chez le fournisseur de 69 000 F CFA est passé en moyenne à 15 000 F CFA [4]. Cela s'est répercuté au niveau des cybercafés où une heure de connexion est passée de 1 000 F CFA à 500 F CFA. Ce qui est un progrès considérable [5]. Une Infrastructure de télécommunication pauvre Les indicateurs de télécommunication sont alarmants si l'on compare aux chiffres occidentaux. Dans les pays développés, la télé densité était en 1996, de 54 %, elle est de 10 % en Afrique du Sud, de 1,11 % au Sénégal et de 0,88 % en Côte d'Ivoire. De manière générale, la télé densité est de 1,85 % en Afrique [6]. Selon le Comité de Régulation des Télécoms, le Mali doit réaliser 500 000 nouvelles lignes pour atteindre une télé densité de 5 %. Cet organe de régulation estime le coût de réalisation d'une ligne à 400 dollars américains. Les 500 000 nouvelles lignes vont coûter à l'État environ 2 milliards de dollars, soit environ 1 500 milliards de F CFA. Cela représentait 88 % du PIB du pays en 2000. Le CRT estime également que même si le Mali décide de consacrer 3 % de son PIB à la réalisation de cet objectif, il lui faudra 30 ans pour y parvenir. Donc à l'évidence, le CRT constate que cette stratégie n'est pas appropriée au cas du Mali compte tenu de la situation économique, sociale et géographique. Le Docteur Cheik Modibo Diarra (Astrophysicien à la NASA), préconise pour réduire les coûts, l'achat d'un satellite pour le continent africain tout entier. Selon lui, il faut investir 200 millions de dollars dans un satellite ou deux dans le domaine de la télécommunication, afin de connecter une dizaine de millions d'internautes et rentabiliser ainsi le coût d'investissement. Il estime, que pendant les 17 ans qui marquent la durée de vie d'un satellite, le continent pourra par conséquent utiliser les bénéfices pour construire des infrastructures de développement (des ponts, des écoles, etc.). À l'heure de la « Société de l'Information » dans laquelle les Nouvelles Technologies de l'Information et de la Communication entraînent l'humanité entière comme une rivière qui sort de son lit pour ensuite embarquer dans l'aventure tout ce qu'elle trouve sur son passage, les pays du Sud se heurtent à un « barrage puissant », celui de l'infrastructure des télécommunications. En effet, le déficit d'infrastructure dépasse le simple cadre des télécommunications et touche à d'autres domaines critiques de l'économie de l'information notamment l'accès à Internet. D'après l'Union Internationale des Télécommunications, il faudrait au moins 50 milliards de dollars pour parvenir à une télédensité de 5 %, en Afrique, soit cinq lignes pour cent habitants. L'environnement Africain de l'information et de la communication notamment celui du Mali se traduit par un faible taux de pénétration du téléphone fixe, une faible croissance des réseaux de télécommunications ; une tarification élevée des installations privées ; et des liaisons téléphoniques (interurbain) encore insatisfaisantes. Depuis la privatisation de la Sotelma, l'opérateur historique de télécommunication, le pays fait preuve de progrès incontestables notamment avec l'arrivée d'Ikatel, un second opérateur de télécommunication, filiale de la Sonatel (opérateur historique du Sénégal) et filiale de France Télécom. Ikatel comptait déjà 400 000 abonnés au téléphone en 2004 alors qu'il est arrivé sur le marché il y a seulement deux ans [7]. La Sotelma quant à elle compte 200 000 abonnés téléphoniques. L'opérateur Ikatel, venu beaucoup plus tard, s'est emparé du marché téléphonique à cause de sa stratégie de baisse de prix important. Ce second opérateur a d'une part permis de doubler en deux ans le nombre d'abonnées au téléphone au Mali et d'autre part, a également éveillé un esprit de concurrence qui mène à une baisse des prix significative. Le nombre de lignes fixes au Mali a évolué progressivement pour atteindre 60 926 lignes en 2003 pour 11 438 000 habitants alors qu'en 1997 il y avait 2 000 lignes pour 9 299 000 habitants. Le nombre d'abonnés au téléphone de type AMPS (réseau analogique de téléphonie mobile utilisé principalement aux USA, en Amérique latine, en Australie) était de 2000 en 1997 et est passé à 5 169 pour 11 438 000. Ce type de réseau téléphonique n'a pas eu beaucoup de succès à cause de son coût très élevé. Seule, la couche la plus aisée de la population pouvait se l'offrir. Le nombre d'abonnés au téléphone de type GSM (Global System for Mobil communication, norme de transmission radio numérique utilisée pour la téléphonie mobile, rebaptisée en français « groupe spécial mobile » elle est la plus répandue en Europe et la plus utilisée à l'heure actuelle) était de 9 700 en 2001 et est passé à 45 974 en 2002, puis en 2003 à 65 500 pour 11 438 000 habitants. Ces chiffres montrent l'engouement de la population pour l'utilisation des téléphones de type GSM dont les prix sont jugés abordables. Depuis la privatisation de la Sotelma, le nombre d'abonnés au téléphone fixe a aussi augmenté grâce à l'ouverture du marché aux opérateurs publics. Au Mali, le nombre de localités équipées en téléphones fixes et en infrastructures pour les téléphones cellulaires a presque triplé de 1999 à 2003. Le nombre d'abonnés au téléphone fixe de la Sotelma est passé à 70 926 en décembre 2004, le nombre d'abonnés téléphone mobile de type AMPS n'a pas changé depuis 2003, il est resté à 5 169, par ailleurs, le nombre d'abonnés au mobile est passé de 65 500 en 2003 à 100 500 abonnées en décembre 2004. Les infrastructures actuelles mises en place pour répondre à la demande du marché ont été essentiellement construites grâce à des investissements de la Sotelma, d'Ikatel et des fournisseurs d'accès à Internet. Le noeud national Internet est assuré par liaisons satellitaires par des faisceaux hertziens numériques de capacité 8 Mbit/s en 34 Mbit/s partant de Bamako. La capacité totale de la bande passante du Mali à Internet est à la date du 24 août 2004 de l'ordre de 19 Mo avec 6 Mo pour la Sotelma et 13 Mo pour Ikatel. La densité téléphonique fixe est en fin 2004 à 1,56 lignes pour 100 habitants. La densité téléphonique mobile est pour fin 2004 de 4,34 lignes pour 100 habitants. La densité fixe et mobile est de 6,0 lignes pour 100 habitants alors qu'en 2003 elle était de 1,15 et à 0,17 en 1996. Obtenir une ligne de téléphone fixe est cependant pour le citoyen moyen très difficile à cause du nombre limité d'offres. Les inégalités géographiques sont également notoires. La capitale Bamako est l'endroit le plus équipé en matière d'infrastructures téléphoniques, c'est pour cela qu'elle a la densité téléphonique la plus élevée. La télédensité est passée de 0,92 en 1997 à 3,94 en 2003 pour cent habitants, elle a triplé en 6 ans. Cependant, elle reste faible pour les zones rurales à 0,7 lignes pour 100 habitants. Le pays a néanmoins étendu sa connexion aux régions de l'intérieur ce qui a permis aux populations rurales de découvrir la toile mondiale mais on est loin d'avoir touché toute la population rurale. De cinq points de présence Internet régionaux créés en 2002 à Kayes, Sikasso, Ségou Mopti et Tombouctou, on compte aujourd'hui une vingtaine de points de présence allant de Kayes à Kidal sur un axe de 250 km2 et ceux-ci ne cessent de se développer. Les indicateurs de télédensité ci-dessous, nous retracent la situation suivante de 1997 à 2003 de la Sotelma (opérateur historique)
Éducation et NTIC au Mali Repères contextuels L'arrivée des Technologies de l'Information et de la Communication suscite aujourd'hui beaucoup de débats dans le domaine de l'éducation en Afrique. Certains pensent qu'elles sont l'outil par excellence qui va améliorer de manière substantielle le système éducatif africain d'autres pensent qu'elles vont contribuer à enfoncer l'Afrique dans sa position de consommateur de « culture occidentale ». L'éducation que l'on peut considérer comme la « matrice polyandre » des administrations africaines, doit épouser cette nouvelle « Société de l'Information. ». Elle doit s'adapter au nouveau contexte économique social pour répondre aux besoins de sa société et former des citoyens capables de vivre avec les commodités d'aujourd'hui. À l'époque des colons, l'école coloniale avait pour missions de produire une élite pour en faire des cadres capables de travailler dans l'administration coloniale. Mais cette école coloniale n'a pas connu le succès escompté. Durant toute l'occupation, elle s'est inlassablement heurtée à des facteurs culturels et des résistances de la part de la majorité de la population. À l'indépendance en 1960 le Mali comptait 95 à 98 % d'analphabètes. Le pays a alors pris de nombreuses résolutions dans tous les domaines pour amorcer un semblant de développement politique, économique et social. L'éducation avait alors pour mission de « promouvoir un enseignement de masse de qualité, adapté aux réalités et aux besoins du pays, de faire un enseignement qui puisse fournir avec une économie de temps et d'argent tous les cadres dont le pays a besoin pour ses divers plans de développement et de faire un enseignement qui décolonise les esprits et qui réhabilite l'Afrique et ses valeurs propres tout en restant ouvert aux valeurs universelles ». En 1960, 7 % de la population seulement avait fréquenté l'école coloniale française. Aux lendemains des indépendances, le Mali va s'efforcer comme tous les autres pays nouvellement indépendants de scolariser le maximum de sa population. Aujourd'hui, trente cinq ans après, le Mali enregistre un taux brut de scolarisation de 64,3 % (soit 53,7 % pour les filles) en 2002-2003. Afin de s'adapter au nouveau contexte mondial qui est l'ère du millénaire, le système éducatif connaît une révision qui se traduit par l'élaboration d'un programme décennal de développement de l'éducation qui a finalement débuté en 2000 et doit prendre fin en 2011. Cette nouvelle politique éducative prend en compte le contexte actuel de la mondialisation et envisage de mettre tout en oeuvre pour adapter son contenu aux exigences du monde actuel [8]. Cependant, la république du Mali a prévu l'introduction des NTIC dans tous les niveaux d'enseignement du système éducatif en tant qu'outils d'apprentissage et de formation pédagogique. Les NTIC comme le prévoient les initiateurs des différents projets devraient permettre non seulement d'améliorer la qualité des enseignements, mais également de réduire la fracture éducative grâce à l'enseignement à distance. Par ailleurs, le renforcement des capacités des ressources humaines devrait faciliter une meilleure appropriation des NTIC par les acteurs et les utilisateurs. La création de filières spécialisées à l'Université et dans les grandes écoles, la formation de formateurs et la formation continue dans le domaine des NTIC devraient également permettre au Mali de se doter des ressources humaines nécessaires qualifiées pour répondre à ses propres besoins notamment en matière de développement de contenus et d'applications. Aujourd'hui l'école publique malienne ne bénéficie pas du même privilège que le privé ; dotée depuis quelques années de matériels informatiques, les élèves de l'école privée malienne ont déjà quelques années d'avance sur ceux des établissements scolaires publics qui eux jusqu'ici n'ont pas encore les moyens d'en bénéficier. Des initiatives sont lancées avec des partenariats à l'étranger pour équiper les lycées publics de salles informatiques sur toute l'étendue du territoire. Depuis quelques années, le gouvernement malien mène une politique d'équipement des lycées et des écoles maliennes en matériel informatique. Ceci a vu le jour d'abord au Lycée de Tombouctou en 2003, ensuite au lycée de Sévaré, à l'école fondamentale de Mopti et par la suite, une longue série de créations de salles informatiques dans les lycées a suivi. Aujourd'hui, presque tous les lycées de la capitale sont connectés. Les observations que j'ai pu mener sur le terrain montrent que l'engouement est au rendez-vous. En effet, Dans les lycées Ba Aminata Diallo, Askia mohamed et le lycée Bilaly Sissoko, les élèves fréquentent leur salle informatique en moyenne 80 élèves par semaine. Les établissements publics n'ont pas encore de programmes informatiques élaborés et pris en compte dans leur formation. On est, dans un premier temps, dans une phase d'appropriation des TIC pour ceux qui sont attirés par l'outil à un coût quand même très bas par rapport aux cyber-espaces, mais qui reste toujours élevé pour la plupart des élèves en raison de 100 F CFA l'heure [9]. Ce tarif a été fixé par les comités de gestion mis en place dans chacun des lycées, une mesure qui a été initiée par le Ministère de l'Éducation nationale. Cette mesure en effet va permettre aux différents lycées de s'initier aux pratiques de gestion autonome (tout en étant toujours financée par le Ministère de l'Éducation nationale certain à 100 % et d'autres par l'ONG Wordlinks ou encore SwissComm). Il faut savoir que ces financements sont octroyés pour une période donnée. Il adviendra aux lycées à l'avenir de gérer le fonctionnement de leur salle informatique. Quelques initiatives actuelles en matière de Tice Dans notre travail, nous avons interviewé un certain nombre de responsables impliqués dans les projets cités. Au Mali, à ce jour, pour ne pas tous les citer nous recensons au moins une dizaine de projets avec des partenaires internationaux et les organismes des Nations Unies, qui vont dans le sens du développement des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Le projet Technologie appliquée à l'école [10] Ce projet est le fruit d'un partenariat entre le Ministère de l'Éducation nationale du Mali et le collège communautaire du Nouveau-Brunswick au Canada. Ce projet est né de la volonté malienne d'importer l'approche d'enseignement des modules pratiques développés à l'école Népisiguit (Canada Nouveau-Brunswick). Le projet contribue à renforcer la capacité institutionnelle du Ministère de l'Éducation nationale à atteindre l'autosuffisance en matière de ressources humaines pour la rédaction et l'enseignement des modules pratiques au niveau de l'enseignement fondamental. Il s'agit pour le Ministère de l'Éducation nationale, d'une part, de s'approprier l'approche modulaire au niveau du second cycle de l'enseignement fondamental par le truchement d'une formation de formateurs de formateurs spécialisés dans la conception et la rédaction de modules adaptés à la réalité socioéconomique du Mali ; et, d'autre part, de former des enseignants qui seront habilités à dispenser la formation modulaire. Ce projet est financé dans le cadre du Programme de Partenariat des Collèges Canadiens (PPCC) géré par l'Association des Collèges Communautaires du Canada (ACCC) et financé par l'Agence Canadienne de Développement International (ACDI). Dans ce programme il s'agit d'élaborer des programmes d'enseignement et des méthodes pédagogiques adaptés, de mettre en oeuvre un cadre incitatif de formation initiale et continue du personnel enseignant, d'augmenter le nombre d'heure d'enseignement, de réduire le nombre d'enfants par classe et d'accroître la disponibilité en matériels didactiques et de manuels scolaires. Le Projet World Links [11] Ce projet est encore une fois, une initiative du Ministère de l'Éducation nationale en collaboration avec l'ONG World Link. L'entreprise est une ONG américaine qui cadre avec la politique des pouvoirs publics pour remplacer progressivement la bourse dans le secondaire par des investissements dans des intrants de qualité afin de bâtir un système éducatif performant. Il s'agit notamment de la construction et de l'équipement de salles informatiques dans tous les lycées. Cette initiative enregistre déjà quelques résultats. Après les lycées des régions de Kayes et de Sikasso, tous les lycées de Bamako ont été équipés chacun d'une quinzaine d'ordinateurs. L'ONG a également formé les responsables administratifs et enseignants des établissements à l'utilisation de l'outil mis à leur disposition. Les différents responsables des salles « informatique » ont également comme missions d'assurer la bonne utilisation des machines et des d'assurer des cours d'informatique aux élèves à leur tour. L'ambition affichée de la coordination nationale de l'ONG est de jeter les bases d'une formation en cascade qui, à terme, permettra à tous les acteurs de l'école (enseignants, élèves) ainsi qu'aux partenaires (APE et comités de gestion scolaire etc.) d'utiliser l'outil d'information, de communication, d'intercommunication, de formation et d'ouverture au monde qu'est l'Internet. L'Internet à l'école [12] Ce projet a été initié par L'Union Internationale des Télécommunications, l'opérateur Télécom Swisscom et le Ministère de l'Éducation nationale du Mali. Il s'agit également dans cette initiative, d'équiper les lycées et écoles de matériels informatiques. Le premier bénéficiaire a été le lycée Mahamane Alassane Haidara de la ville de Tombouctou en 2003 ensuite le lycée de Sévaré et l'école fondamentale de Mopti en 2004. Les professeurs, les élèves et l'administration du lycée sont directement connectés à leurs homologues du Lycée de Porrentruy dans le Canton du Jura. À travers cette expérience, une passerelle numérique a été ainsi établie entre une ville fortement enclavée du Sud et une ville du Nord. La salle de connexion du Lycée des trois villes est actuellement très sollicitée par les étudiants et les autres personnes désirant se connecter sur Internet. Le projet de connectivité de l'Université du Mali [13] Le projet de connectivité de l'université du Mali est une suite logique amorcée par la coopération américaine dans sa volonté de connecter le Mali au réseau des réseaux. L'Université du Mali a bénéficié pour ce faire, d'un projet de connexion sans fil de type Intranet et Internet. Ce projet qui est a peu près effectif a permis de relier entre eux et de connecter les quatre Facultés, les trois Instituts et les trois grandes écoles que compte l'Université du Mali et qui sont dispersés dans la ville de Bamako. Le besoin d'un service coordonné se faisait sentir, car finalement la seule structure chargée de superviser les opérations de l'Université, avait du mal à faire communiquer les universités entre-elles. D'où le besoin de disposer d'une infrastructure de télécommunication couvrant toute l'Université. Les structures de l'Université du Mali ne disposant pas suffisamment d'infrastructures en terme de ligne téléphonique, le projet va opter pour la connexion sans fil pour relier ses entités entre elles. L'Université et le CNRST (Centre National de Recherche Scientifique et Technique) se passent des fournisseurs d'accès en utilisant une liaison radio les reliant directement à la Sotelma. Deux serveurs centraux sont créés et gérés par l'Université et le CNRST. Au niveau de chaque faculté, école ou institut, il existe un serveur local et un Intranet ainsi que des salles informatiques équipées d'ordinateurs connectés à l'Internet Le document ci-dessous est tiré du document technique de faisabilité de l'installation du réseau de l'Université. Projet FIER [14] L'USAID (La Coopération Américaine pour le développement) a également financé un projet d'éducation par la radio appelé FIER. Il s'agit d'un espace de formation pédagogique initiale et continue des enseignants qui utilisent la radio et les TIC pour la création de modules de formation radiophonique et numérique de qualité. Il s'agit d'une autoformation des enseignants qui sera développée au moyen de messages pédagogiques appuyés par une démarche pré-action, action et post-action. Le programme FIER permettra de renforcer la maîtrise du langage gestuel, le travail collaboratif et la découverte de la pédagogie de la leçon-débat. L'État malien pourra former ainsi chaque semaine les 3 500 enseignants dans 6 séries d'émissions et dans les différents centres virtuels qui sont en cours de création dont certains sont déjà fonctionnels. Discussion et perspectives de recherche : la « I-Génération » [15] Le défi du Mali d'intégrer un monde nouveau implique incontestablement que les acteurs et les bénéficiaires que sont les jeunes (Plus de 50 % de la population a moins de 25 ans) soient formés par des structures formelles ou informelles fiables. C'est dans cette optique qu'une manifestation appelée e-festival se tient à Bamako chaque fin d'année qui consiste à récompenser les jeunes utilisateurs de 10 à 21 ans qui se sont fait remarquer dans la maîtrise des outils informatiques. Cette manifestation s'inscrit dans le cadre de la politique nationale des NTIC et le Plan stratégique d'application adopté par le gouvernement malien. Elle va encore une fois contribuer à la maîtrise de l'informatique par les citoyens maliens notamment la population jeune. Les NTIC sont cependant utilisés dans tous les établissements privés (lycée) du Mali, mais ceux ci ne sont pas accessibles à la bourse de la majorité des Maliens. Cette initiative des politiques devrait permettre à un grand nombre de jeunes de se familiariser avec l'outil avant une généralisation prévue pour 2008. Les jeunes ou la « I-génération » constituent la majorité de la population et, de ce fait, sont les récipiendaires légitimes de ces outils. En effet, les retombées d'Internet seront ressenties par eux avec plus d'impact. Il suffit d'observer l'évolution des NTIC dans les pays comme le Mali, et l'engouement des jeunes pour ces pratiques pour s'en convaincre. Les « Cyber-espaces » qui sont des structures ouvertes par les entrepreneurs et qui offrent des services d'accès à Internet sont devenues des lieux de rencontres aujourd'hui. En effet, il en existe d'après le CRT au moins 200 à travers le pays, mais la plupart sont concentrés dans la capitale. Une habitude de jadis, que pratiquaient les adultes nés durant et avant le dernière décennie, était de se retrouver autour d'une théière pour boire du thé dans l'après-midi, cette habitude appelée « Grin » est presque devenue un rituel. Mais depuis la prolifération des cyber-espaces, les plus jeunes ont déménagé leur « Grin » dans les cyber-espaces. Étudiants, jeunes commerçants, ou jeunes diplômés sans emploi se retrouvent désormais dans les cyber-espaces non plus pour bavarder autour d'une théière mais pour se connecter à Internet Alors que l'Internet a été introduit dans le pays de façon complète en 1997 son expansion semble gagner du terrain aussi bien dans le milieu formel que dans le milieu informel. Mais le coût élevé est comme nous l'avons indiqué, un important frein. Depuis peu de temps, une association d'utilisateurs de logiciel libre assure des formations pour les associations et jeunes maliens [16]. En Afrique, il existe beaucoup d'administrations, au Sénégal, et en Mauritanie par exemple, qui basculent vers le logiciel libre et le mouvement est en train de s'accélérer. Est-ce une solution ? Une autre alternative pour l'accès au plus grand nombre ? Par ailleurs, des signes d'espoir apparaissent pour l'acquisition du matériel informatique, notamment pour ce qui est du coût. Il faut dire, qu'au Mali, la TVA sur le matériel informatique importé dans le pays est supprimée, c'est une décision du gouvernement qui permet le développement des NTIC dans le pays par l'accès du plus grand nombre. Par ailleurs, lors du SMSI (Sommet Mondial sur la Société de l'Information) à Tunis, le prototype de l'ordinateur à 100 dollars a été présenté aux participants, conçu par le Massachusetts Institut of Technology (MIT), l'ordinateur portable est rechargeable à l'aide d'une manivelle et fonctionne avec un système d'exploitation de logiciel libre et pourrait permettre l'accès à des milliers d'écoliers de pays en voie de développement (voir le Bloc-notes / Actualité). Ce projet pourrait également, peut-être, contribuer à réduire la fracture numérique en touchant le jeune public. En conclusion, les NTIC pourraient aider au développement de l'éducation en Afrique et singulièrement au Mali sans être bien sûr la panacée. Elles peuvent être un outil d'accompagnement d'une politique éducative déjà bien conçue. Le problème majeur des pays en développement est de trouver des solutions pour désenclaver les villages les plus reculés. Une fois ce défi relevé, il sera beaucoup plus de facile d'agir de façon directe et rapide, avec une collaboration assidue, pour le développement du continent. La Banque Mondiale a accordé un prêt au Mali, dans le secteur des télécommunications mais sous un certain nombre de conditions notamment d'ouvrir le secteur à la privatisation. Ce qui a été le cas. Pour le Mali le principe a plutôt bien marché car le Mali a deux grands opérateurs dont la concurrence joue en faveur du développement des NTIC dans le Pays. Maintenant, un certain nombre de questions se posent : Il serait intéressant de se pencher également sur le cas de pays comme le Sénégal, le Burkina Faso, identifier les différences de pratiques qui peuvent émerger d'un pays à un autre et justifier par une analyse scientifique pour expliquer ses différences au sein d'un même continent. Voir dans le milieu immigré des maliens de l'extérieur notamment de la France, comment ces outils sont utilisés par ces derniers, à quelles fins, et quelles sont les répercussions de ses utilisations au Mali ? Finalement essayer de comprendre aussi le cas d'un pays anglophone afin de comprendre pourquoi ce dernier aurait une avance sur les pays francophones, serait-elle culturelle ou tout simplement liée à l'implication politique ? Comprendre aussi vers quel type de développement des NTIC l'Afrique (en s'appuyant sur le cas du Sénégal du Burkina Faso et du Ghana) va se heurter en comparant justement son cas à un cas occidental pour mieux comprendre finalement comment les NTIC dessinent leurs chemins à travers les frontières, les cultures et les époques et les inégalités des sexes ? Finalement, bon nombre de chercheurs parlent de NTIC comme des outils qui n'ont pas de frontière. On pourrait peut-être parler de frontière pour les délimitations géographiques. Mais ces frontières, pourraient éventuellement exister sous d'autres formes dans leur processus de développement dans certain contexte, se heurter à des barrages culturels, de générations ou autres. Pour mieux cerner les problématiques autour des NTIC une étude comparative serait probablement un moyen efficace. Le 17 mai 2006 Maïmouna Sissoko-Touré Références bibliographiques Ouvrages Antonielli C. (1991). La diffusion des télécommunications de pointe dans les pays en développement, centre de développement de l'organisation de coopération et de développement économiques. Baron G.-L. (1997). Technologies Nouvelles et accès à l'information en milieu scolaire, CRDP de Poitou Charente, IUFM de Académie de Poitiers. Baron G.-L. et Bruillard É. (2004). Quelques réflexions autour des phénomènes de scolarisation des technologies, in, L.-O. Pochon et A. Maréchal, Entre technique et pédagogie. 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Documents Politique nationale des Technologies de l'Information et de la Communication au Mali, document du Ministère de la Communication et des Nouvelles Technologies, 2004. Rencontre des points focaux du projet « e-school » de la Communication e-Africa du NEPAD, document du Ministère de l'Éducation nationale, Mohamed Ag Hantafaye, 2005. Formation Interactive des Enseignants par la Radio – FIER, Guide du Facilitateur, document USAID, 2005. Raccourcir les distances, rapprocher les peuples et les idées. Le Réseau Mondial, d'Échanges de Connaissances pour le Développement, GDLN, document de la Banque Mondiale, 2000-2005. Internet http://www.world-links.org. http://www.anais.org. http://www.usaid.gov/regions/afr/. http://www.nepad.org. http://www.sotelma.ml. http://www.ikatel.net. http://www.education.gov.ml. http://www.iicd.org. NOTES [1] Rapport PNUD 2002. [2] Information recueillie lors d'un entretien réalisé avec Cheik Modibo Diarra. [3] Informations recueillies auprès le la l'AGETIC (Agence malienne pour le développement des technologies de l'information et de la Communication). [4] 1 euro = 655 F CFA. [5] Informations recueillies auprès des structures concernées (Malitel/Ikatel/Sotelma/Cybers). [6] Source IUT. [7] Information recueillie sur le site de Ikatel Mali, http://www.ikatel.net/. [8] PRODEC (Programme National de Développement de l'Éducation), document produit par le Ministère de l'Éducation nationale. [9] 100 F CFA = 15 centimes d'euro. [10] Informations recueillies au cours d'un entretien avec M. Lamine Diallo, chargé de mission au Ministère de l'Éducation nationale. [11] Information recueillie lors d'un entretien avec M. Fofana, Directeur adjoint de AGETIC (Agence de Développement des Technologies de l'Information et de la Communication). [12] Information recueillie auprès de M. Fofana directeur adjoint de l'Agence de Développement des Technologies de l'Information et de la Communication. [13] Information recueillie auprès de Madame Martine Keita responsable du secteur communication pour le développement à l'USAID Mali. [14] Informations recueillies auprès de Mme Coulibaly, la responsable du projet FIER au Mali. [15] Terme de M. Bill Gates désignant les enfants nés à la fin du deuxième millénaires. [16] Informations recueillies auprès de la Fondation Pathfinder du Dr Cheik Modibo Diarra. ___________________ |
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