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L'intelligence artificielle n'existe pas

Luc Julia, Éditions FIRST, 2019, 292 pages, 18 euros.

   Le ton est donné dès les premières pages.

   « Tout est parti d'un immense malentendu. En 1956, lors de la conférence de Dartmouth, John Mc Carthy a convaincu ses collègues d'employer l'expression "intelligence artificielle" pour décrire une discipline qui n'avait rien à voir avec l'intelligence. Tous les fantasmes et les fausses idées dont on nous abreuve aujourd'hui découlent, selon moi, de cette appellation malheureuse. »

   La première partie, d'une centaine de pages, est consacrée à la brillante carrière internationale de l'auteur, scientifique toulousain, un des gourous mondiaux de l'intelligence artificielle. Il est aujourd'hui vice-président innovation de Samsung monde et dirige son laboratoire d'IA récemment installé à Paris.

   Il s'emploie ensuite à nous convaincre que l'intelligence artificielle n'existe pas. Luc Julia préfère traduire IA par Intelligence (humaine) Augmentée . En effet, pour parler d'intelligence artificielle il faudrait d'abord avoir une idée du fonctionnement de notre cerveau, or on en est loin !

   L'auteur, qui aime les images qui frappent, rappelle que pour qu'une machine reconnaisse un chat avec une précision de 95 % elle a besoin de quelque chose comme 100 000 images de chat. Les enfants pour leur part n'auraient besoin, selon les psychologues, que de deux images de l'animal pour reconnaître à vie un chat dans n'importe quelle circonstance et de manière quasi infaillible (p.123). Cherchez l'erreur.

   De même, quand AlphaGo bat le champion du monde en 2016, sa force brute basée sur trente millions de coups stockés en mémoire n'a rien à voir, notamment pour des questions de temps, avec la méthode employée par Lee Sedol que ce dernier ne sait d'ailleurs pas expliciter !

   Dans le chapitre « Le monde du futur » l'auteur donne libre cours à son imagination débordante et conclut que l'Intelligence Augmentée va nous apporter du bien être et du confort (p.270). Mais à quel prix ?

   Laissons-lui le dernier mot (le gras est de la rédaction EPI) :
« Je ne peux exclure qu'elle [l'intelligence artificielle] existera un jour, je pense qu'elle nécessitera un changement d'approche tel, fondé sans doute sur un mélange de sciences bien différentes telles que la biologie, la chimie ou encore la physique quantique, qu'il n'y a guère de chances de la voir émerger avant plusieurs centaines d'années. C'est pour cela que je souhaite qu'on change le terme « intelligence artificielle » en « intelligence augmentée », et qu'on cesse d'employer ce mot « artificielle », qui cristallise toutes les peurs et qui est trompeur et mensonger. Outre le fait qu'il n'est pas besoin de changer l'acronyme "IA", je suis très à l'aise avec l'appellation "intelligence augmentée", parce qu'elle exprime bien mieux qu'intelligence artificielle le fait qu'elle soit conçue pour améliorer notre intelligence plutôt que pour la remplacer. »

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Association EPI
Mars 2019

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