Open Education Global 2023 à Edmondon, retour par l'équipe RELIA

Open Education Global 2023 à Edmondon,
retour par l'équipe RELIA

Colin de la Higuera

La conférence internationale Open Education Global [1] s'est tenue à Edmonton (Alberta, Canada) entre le 16 et le 18 octobre 2023. Pour mémoire, c'est Nantes qui a organisé les éditions 2021 (en ligne) et 2022.

Nous étions co-auteurs de plusieurs propositions et sommes allés à trois à Edmonton pour présenter celles-ci mais aussi et surtout pour réseauter.

Photo prise par Colin de la Higuera.

Retour sur nos interventions

Lundi, Bastien Masse a présenté un exposé démontrant l'utilisation des intelligences artificielles génératives, en particulier Chat-GPT, pour résoudre des problématiques liées à l'Éducation Ouverte. Son exposé comprenait la génération de prompts pour analyser des Ressources Éducatives Libres (REL), trouver la licence associée, remplacer une image sous copyright par une image libre de droits, analyser les métadonnées des REL, etc. De plus, il a eu l'occasion de tester la dernière fonctionnalité de Chat-GPT sortie la semaine précédente : la reconnaissance d'images et son analyse. La salle était pleine lors de cette présentation.

Mardi, Colin de la Higuera a présenté un projet, en cours de validation, lié au réseau UNITWIN [2], qui regroupe 16 partenaires internationaux du Nord et du Sud travaillant sur l'Éducation Ouverte. Les objectifs de ce projet sont variés, et concernent notamment le multilinguisme, le soutien aux acteurs internationaux souhaitant être accompagnés par L'Unesco, ainsi qu'un volet recherche. Un partenariat international prometteur donc !

Mercredi, Colin de la Higuera a exposé la stratégie et la feuille de route [3] de Nantes Université, qui a déployé sa stratégie en faveur de l'Éducation Ouverte depuis plus d'un an. Il a évoqué les acteurs impliqués et les premières actions mises en place, inspirées notamment de nos ateliers « Je crée ma REL » [4]. De nombreuses questions ont été posées concernant le partenariat envisagé avec la FabriqueREL Canadienne et la manière dont cette collaboration serait adaptée au contexte de Nantes.

Vous souhaitez voir et/ou revoir des conférences de l'Open Education Global 2023 ? C'est possible car deux des salles ont fait l'objet de captation vidéo. Rendez-vous sur OEG Connect [5] pour accéder au replay.

Colin de la Higuera s'est également prêté au jeu des interview lors de la conférence, retrouvez-là ici [6] (8'06).

Et, qu'avons-nous retenu de la Conférence Open Education Global 2023 ?

L'avis de Mélanie Pauly Harquevaux

Je retiens plusieurs choses de ces trois jours intenses en échanges. Tout d'abord, les rencontres réalisées que ce soit avec mes collègues francophones venu·es de part et d'autres du Canada, de France mais encore des retrouvailles avec des visages familiers de l'année passée.

D'un point de vue plus scientifique, je crois que l'intelligence artificielle n'a jamais occupé une place aussi centrale dans les échanges et débats en lien avec l'Éducation Ouverte et notamment autour de son impact dans les années à venir.

Aussi, cette conférence a permis de mettre en lumière les différences d'argumentaires en faveur des REL d'un pays à un autre. En effet, au Canada ou aux États-Unis, les arguments en faveur de l'adoption des Ressources Éducatives Libres sont plus clairs et simples, notamment pour les enseignant·e·s et les étudiant·e·s. Dans ces pays, l'adoption de Ressources Éducatives Libres (REL) conduit à des économies directes. Un chiffre qui m'a marqué, par exemple, est celui de l'Université de Maricopa [7] en Arizona, où 30 millions de dollars d'économies ont été réalisés en 10 ans auprès de 99 000 étudiant·e·s, grâce à l'adoption d'open textbooks.

En revanche, en France, les coûts sont plus opaques, et nous n'avons pas toujours l'impression de les supporter directement en tant qu'étudiant·es. En France, il y a un réel enjeu autour de l'argumentaire en faveur des REL, qui se différencie en mettant davantage l'accent sur la collaboration entre pairs et les enjeux liés à l'accessibilité.

L'avis de Bastien Masse

Le sujet de l'intelligence artificielle a été très présent durant cette Conférence OEG 2023. Plusieurs intervenants ont traité cette thématique, et l'IA a également été citée à plusieurs reprises durant les plénières. Une situation bien évidemment liée à l'accélération du développement des IA génératives, mais qui permet de reposer au cœur des débats les apports, mais aussi les risques liés à ces technologies. L'intelligence artificielle permet en effet d'adresser de nombreuses difficultés liées aux ressources éducatives libres : leur identification et la vérification de leur licence grâce à la remontée automatique de données, l'analyse comparative de ressources ou de versions, la mise à jour des contenus, l'intégration d'images libres de droits de qualité, l'exploration documentaire. Des défis majeurs auxquels certaines IA semblent pouvoir répondre, mais pas sans déplacer le problème. Car l'utilisation d'IA génératives notamment, soulève d'autres questions telles que la garantie des droits d'usage et de diffusion de ses contenus, les biais potentiels et une vision normative du monde, les hallucinations entraînant de faux résultats sur les licences, les sources, ou les informations. Lors de cette OEG, j'ai par exemple assisté à un atelier sur les techniques de description d'image pour les sites web et les contenus se voulant accessibles. Une tâche, qui, d'après les intervenantes restait difficile à automatiser avec leurs critères de qualité. Si l'IA n'est donc pas susceptible de résoudre toutes les difficultés liées au REL, elle semble pour le moment, de par son efficacité, devoir être un outil difficile à ignorer dans les années à venir. Renforçant l'importance de comprendre son fonctionnement, ses capacités et ses limites, et surtout d'inclure dans nos réflexions sur l'éducation ouverte, une dimension technologique et technique.

L'avis de Colin de la Higuera

La question des premières nations (first nations, indigenous people) a été choisie par les organisateurs pour être un fil conducteur des débats. C'est une question importante à laquelle nous, Européens, ne sommes sans doute pas sensibilisés. J'avoue avoir mis un temps pour m'approprier la thématique et saisir les subtilités des positionnements. Mais petit à petit je crois avoir adhéré en grande partie aux points de vue qui nous étaient proposés. Les exposés mêlant des analyses nouvelles des questions de l'éducation ouverte avec l'art (du violon, des chants, de la danse, de la flûte) étaient clairement hors de nos formats habituels. Et la gestion du temps chez nos hôtes était fondamentalement importante. Oui, prendre ses décisions en considérant les 7 générations qui nous ont précédées et les 7 qui doivent nous suivre... cela fait beaucoup de sens !

La conférence invitée de Cable Green était passionnante. Cable est un des cadres de Creative Commons et a une réflexion bien plus radicale que la nôtre sur le rôles des éditeurs (publishers). Il utilise l'exemple de l'open access où, selon son analyse, les éditeurs ont changé un modèle économique : on faisait surpayer les articles aux consommateurs et on est passés à un modèle où ce sont simplement d'autres (les auteurs) qui surpayent. Mais Cable renvoie la faute sur les universitaires eux-mêmes qui entretiennent ce système (pour voir cette conférence [8]). Et la conclusion est pour lui claire : a-t-on vraiment besoin des éditeurs ?

Enfin, la conférence m'a permis de découvrir de nombreux travaux de recherche (plutôt dans les salles non filmées) et j'ai été impressionné par l'énergie déployée sur des questions de recherche... mais systématiquement en langue anglaise. Il est évident qu'il va falloir faire des efforts dans le monde francophone !

Colin de la Higuera
Enseignants Nantes
Département Informatique UMR_6004
Laboratoire des Sciences du Numérique de Nantes

Photo prise par Colin de la Higuera.