L'égalité filles-garçons
Un rapport, une journée, et plein d'autres initiatives, la problématique de l'égalité filles-garçons est de plus en plus d'actualité.
Faire de l'égalité filles-garçons une nouvelle étape dans la mise en œuvre du lycée du XXIe siècle
Ce rapport remis à Jean-Michel Blanquer le 9 Juillet dernier, a été rendu public [1]. On peut lire dans le préambule : « L'égalité entre les femmes et les hommes est en France un sujet sensible depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, faisant paradoxalement à la fois l'objet d'un consensus national et le sujet de nombreux débats, l'opinion publique devançant parfois les décisions politiques. Elle est encore aujourd'hui un sujet d'actualité souvent brûlant... ». De plus en plus brûlant même. Car si les combats menés ont permis des avancées significatives, il reste encore beaucoup à faire.
« L'École a largement contribué à l'émancipation des femmes et à leur participation progressive à la vie économique, sociale et intellectuelle de notre pays. Toutefois, force est de constater qu'aujourd'hui, malgré des résultats scolaires supérieurs à ceux des garçons, les filles restent très en retrait ou insuffisamment présentes dans les filières scientifiques, industrielles et numériques, qui contribuent pourtant à déterminer notre avenir commun. Quant aux garçons, ils restent très minoritaires dans les filières littéraires, artistiques, ou dans les parcours menant aux métiers du soin. Question démocratique fondamentale, l'égalité filles-garçons constitue ainsi un enjeu majeur du système éducatif et concerne tous ses acteurs. »
Filles, maths et informatique : une équation lumineuse
Les mathématiques et l'informatique souffrent encore du stéréotype d'être des « domaines de garçons ». Les filles sont donc sous-représentées dans ces filières. La journée « Filles, maths et informatique : une équation lumineuse » du 10 décembre 2021 a démonté ces clichés [2]). « Les sciences ne peuvent pas se passer de la moitié de l'intelligence humaine. » C'est sur ces mots entonnés par Manuel Péan, inspecteur de mathématiques de l'académie d'Orléans-Tours, que la journée « Filles, maths et informatique : une équation lumineuse » a commencé. À cette occasion, une centaine de lycéennes se sont rassemblées dans un amphithéâtre de l'école d'ingénieur Polytech à Tours. Pour s'informer sur les métiers liés aux mathématiques et à l'informatique. Et, plus important encore, pour réfléchir à l'impact des stéréotypes de genre sur leurs choix d'orientation et sur le manque de mixité dans ces deux disciplines.
Si l'École peut beaucoup, elle ne peut pas tout. D'évidence, la question a une dimension extra-scolaire. Un regard sur l'informatique libre pour, si nécessaire, s'en persuader.
Le cas éclairant de l'informatique libre [3]
2010 : on comptait alors environ 25 % de femmes dans le secteur des TIC (plus large que l'informatique stricto sensu). Et seulement 6 % dans le logiciel libre. Le chiffre avait surpris, signalant une distorsion particulière entre la réalité et les valeurs, les principes et la philosophie du logiciel libre. Richard Stallman se plaisait à dire : « Liberté-Égalité-Fraternité. On s'attendait donc à des chiffres meilleurs pour l'informatique libre. Mais des raisons extra-scolaires... ».
La vie quotidienne
À propos des facteurs externes qui semblent empêcher l'augmentation du nombre des femmes dans le secteur, la question de leur temps libre dans la société actuelle est souvent évoquée. En effet, quand il ne s'agit pas d'une activité professionnelle, les programmeurs du libre codent en dehors de leur temps de travail, la nuit notamment. Nombreux sont ceux qui ne manquent pas de faire remarquer que le temps libre n'est pas (encore) la chose la mieux partagée dans le monde des genres. Les femmes sont davantage ancrées dans les servitudes de la vie quotidienne.
Les stéréotypes
On constatait déjà une régression dans les professions de l'informatique. En effet, au début de cette industrie, les femmes y étaient nombreuses : les stéréotypes ne jouaient pas. Il y avait un espace à occuper, à conquérir, notamment pour celles et ceux qui pouvaient se sentir « mal à l'aise » dans d'autres domaines tels que les mathématiques.
Une dimension de « combat politique »
La philosophie générale du libre, sa transférabilité à la production d'autres biens immatériels au plan des méthodes de réalisation et des réponses en terme de propriété intellectuelle (voir les licences Creative Commons) font que le mouvement du libre dépasse le cadre de l'informatique proprement dite. Ces dimensions sociétales, éthiques sont de nature à susciter l'intérêt des femmes et donc à contribuer à un « rééquilibrage ». Mais, contradictoirement, cette dimension « politique » au sens large avec ses rapports de force, ses luttes pour une influence et des pouvoirs joue en sens inverse. Cette dimension de « combat » est explicitement plus marquée que dans l'informatique en général. Les débats peuvent être « vifs », que ce soit avec l'informatique propriétaire ou lors de l'examen de grandes questions comme la transposition de la directive européenne DADVSI (Droits d'auteurs et droits voisins dans la société de l'information) ou la loi Hadopi. Les affrontements que signifie la teneur idéologique et politique prononcée du libre ne sont pas nécessairement prisés par les femmes qui peuvent s'y sentir mal à l'aise. On retombe là sur le phénomène bien connu de la place des femmes dans la vie politique.
Des comportements individualistes
Comme dans tous les mouvements humains existent des comportements élitistes. Il existe des geeks aux capacités communicatives limitées, ce qui ne prédispose guère au travail collaboratif. La recherche de la perfection complique l'acceptation des différences. Des trajectoires personnelles peuvent engendrer des attitudes de rejet, à l'encontre des autres en général et des femmes en particulier.
Et, dans le libre comme ailleurs, on rencontre des gens qui s'affirment haut et fort comme ils ne sont pas car ils ne s'assument pas comme ils sont. D'où, pour toutes ces raisons, des comportements orthogonaux aux valeurs du libre (non partage, travail dans son coin, suspicion vis-à-vis des contributions d'autrui...). Même s'ils sont loin d'être majoritaires – le libre ne se réduit pas à ça et il est dans bien des circonstances conforme à ses valeurs –, ces comportements n'en existent pas moins, inégalement répartis dans l'écosystème. Et l'on peut avoir le sentiment que leur pouvoir de nuisance est plus efficace dans le domaine du genre que dans d'autres domaines.
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Un appel à la grève en cette rentrée
Quelques mots sur l'actualité en cette rentrée. Toutes les fédérations syndicales de l'Éducation nationale (Fsu, Unsa, Cfdt, FO, Cgt, Sud, SNE) ont appelé à la grève le jeudi 13 janvier. Dans une Tribune au JDD, 2 700 acteurs de l'éducation et des médecins dénoncent le bilan de Macron et Blanquer à l'École [4]. Le mécontentement est profond et général.
Des investissements ont été refusés, y compris pendant la crise sanitaire, après avoir économisé sur le budget de l'Éducation nationale, 600 millions d'euros en 2020 et 75 millions en 2021. Les demandes répétées de sécuriser classes, cantines et salles de sport, maillons faibles reconnus de l'École, n'ont jamais été entendues. Ainsi, en Europe, la plupart de nos voisins ont-ils davantage investi, par exemple rien que pour l'aération. La vague actuelle de la pandémie signe l'échec d'une prévention qui s'est révélée très insuffisante.
En 5 ans, 7 900 postes ont été supprimés dans les collèges et lycées du pays : cela revient à rayer 175 collèges de la carte !
L'absence de transparence a été un autre marqueur de la gestion sanitaire des établissements scolaires. En outre, le ministre de l'Éducation nationale a la fâcheuse tendance de communiquer les évolutions de protocole les veilles de rentrée.
La politique du ministre est également basée sur un contrôle des pratiques enseignantes avec des injonctions sur les méthodes pédagogiques des enseignants : cette caporalisation pèse sur les équipes enseignantes qui ne disposent plus de leur liberté pédagogique.
La réforme du lycée apparaît sans attendre pour le moins comme un calcul « hasardeux ». La réforme du baccalauréat a supprimé son caractère national. Et le ministre persiste à vouloir que les épreuves des spécialités se déroulent en mars : complètement « hors sol » ! La réforme du lycée a également réduit le nombre d'heures de mathématiques au lycée de 20 %, alors que les résultats sont réputés insuffisants dans les études PISA ou TIMSS.
Ce gouvernement porte une lourde responsabilité dans la perte d'attractivité de nos métiers Pour la première fois dans l'histoire de la 5e République, les gouvernements ont gelé le point d'indice pendant l'intégralité du quinquennat.
L'École Blanquer est celle de la reproduction sociale, d'une forme de complaisance avec le privé au détriment de l'École publique.
Jean-Pierre Archambault
Président de l'EPI
NOTES
[1] Voir la rubrique « Rapports et douments ».
https://www.epi.asso.fr/revue/lu/l2112a.htm
[2] https://filles-et-maths.fr/journees-filles-maths-informatique/#presentation
[3] Le genre et le logiciel libre, Jean-Pierre Archambault, Ayuko Sedooka, Georges-Louis Baron.
https://www.epi.asso.fr/revue/articles/a1010h.htm
Les femmes, le logiciel libre, vous et moi aux RMLL 2010, 11es Rencontres Mondiales du Logiciel Libre, début juillet 2010 à Bordeaux, Alexis Kauffmann, Jean-Pierre Archambault
https://edutice.archives-ouvertes.fr/edutice-00560705/file/a1010e.htm
[4] https://www.lejdd.fr/Societe/tribune-2700-acteurs-de-leducation-et-des-medecins-denoncent-le-bilan-de-macron-et-de-blanquer-a-lecole-4086748
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