Enseignement de l'informatique, en France et ailleurs
 

   Un enseignement de spécialité optionnel en Terminale S « Informatique et sciences du numérique » vient d'être créé dans le cadre de la réforme du lycée pour la rentrée 2012 : une première réponse correspondant aux enjeux forts de la société et de l'économie au 21e siècle. Car si l'informatique représente 30 % de la R&D au plan mondial, en Europe cette part n'est que de 17 % [1].

   Que font nos voisins, et d'autres, en matière d'informatique pédagogique ? Pas toujours évident à savoir, le caractère fédéral de certains pays entraînant des disparités régionales [2]. La question de l'enseignement de l'informatique a donné lieu comme chez nous à des débats « vifs », prolongés et récurrents. Depuis deux ou trois ans des enseignements de la discipline informatique ont fait leur retour [3]. L'informatique « outil », les TICE dont la nécessité ne saurait se discuter, ayant fait la preuve de son incapacité à apporter une réponse adéquate aux besoins de formation scientifique et technique en matière d'informatique et de sciences du numérique.

   En Suisse, depuis l'année scolaire 2008/2009, les gymnases peuvent proposer l'informatique comme option complémentaire. Les cours peuvent être organisés sur une ou deux années scolaires. Le nombre de leçons annuelles se situe entre deux et huit, une leçon annuelle correspondant à 40 périodes de 45 minutes. Dans les objectifs généraux du Plan d'études cadre, on peut lire : « l'option complémentaire informatique se doit de fournir des bases dans les domaines de l'algorithmique, de la programmation, de la théorie informatique ainsi que de l'information et de la communication. La réalisation de projets en réseau convient particulièrement bien à l'approfondissement de l'un ou de plusieurs de ces domaines. »

   L'État canadien de l'Ontario a engagé un travail très important pour un enseignement de l'informatique entre la dixième et la douzième année d'études. Il s'agit, à la base, d'un enseignement optionnel de 110 heures annuelles. Le document curriculaire précise : « Pour réussir dans le monde professionnel, l'élève doit non seulement utiliser efficacement les outils technologiques et traiter un volume important d'information, mais aussi être en mesure de continuellement adapter et de mettre à jour ses connaissances pour faire face aux changements de la société. Les cours d'études informatiques offrent à l'élève une opportunité unique de comprendre le fonctionnement d'un ordinateur de bureau, d'un téléphone mobile ou d'une calculatrice graphique, ce qui le conduira naturellement à démystifier les technologies de l'information et des communications (TIC) et à les utiliser dans d'autres disciplines, ainsi qu'à jeter les bases d'un perfectionnement professionnel enrichissant prenant en compte l'évolution des technologies informatiques. »

   Le cas de la Bavière est exemplaire. L'introduction de l'informatique comme matière fondamentale (et non comme discipline optionnelle dans certains établissements) représente une évolution importante que la Bavière a choisi de réaliser rapidement dans ses lycées. Les programmes comportent, par exemple, au niveau 9 « l'introduction aux SGBD et à leur exploitation » ; au niveau 10 « la présentation de la notion d'algorithme avec une initiation à la programmation dans un langage orienté objet (32 heures) » ; au niveau 11 « l'approfondissement de l'algorithmique avec les structures de données récursives (listes, arbres) (58 heures) » ; au niveau 12 « divers approfondissements : calculabilité, architecture des ordinateurs, langages formels et automates (43 heures), communication entre processus et synchronisme (20 heures) ».

   En Tunisie, dans le cadre d'un enseignement pour tous les élèves depuis plusieurs années, à l'École de base, à travers des projets, les élèves apprennent à manipuler les ordinateurs, à exploiter les possibilités offertes par les logiciels de bureautique et de multimédia et à manipuler les périphériques. Au collège ils exploitent les fonctions élémentaires d'un ordinateur, produisent des documents numériques, se documentent et communiquent avec les TIC. Au lycée, les cursus des sciences informatiques comportent explicitement et d'une manière détaillée des notions sur « l'architecture d'un micro-ordinateur, le système d'exploitation et les réseaux, Internet, l'algorithmique, la programmation et les bases de données. »

   Au Maroc, après deux années d'expérience (au début de l'année scolaire 2005/2006) la décision a été prise de généraliser l'enseignement de l'informatique, en tant que matière obligatoire, dans tous les troncs communs (le tronc commun est la première année de l'enseignement secondaire qualifiant). Parmi les objectifs figurent notamment « l'adoption de la démarche algorithmique pour résoudre un problème donné » et « la transcription d'un algorithme dans un langage de programmation de haut niveau ».

   Ce tour d'horizon est certes partiel [2] mais il traduit un mouvement en faveur de la discipline informatique composante en tant que telle de la culture scolaire. C'est l'époque qui le veut.

Le 15 janvier 2010

Jean-Pierre Archambault
Président de l'EPI

NOTES

[1] « Si l'on observe par exemple la liste des 250 entreprises les mieux cotées sur le marché mondial des TIC, on constate que "les compagnies américaines sont moins nombreuses en 2006 que quelques années auparavant" » note Dan Schiller dans « Internet enfante les géants de l'après-crise », Le Monde Diplomatique, décembre 2009. Au profit notamment de la Chine, l'Inde, le Brésil, l'Afrique du Sud et la Russie – « Perspectives des technologies de l'information de l'OCDE 2008 »
http://www.oecd.org/dataoecd/36/5/42017367.pdf.

[2] L'EPI et le groupe ITIC de l'ASTI ont entrepris un recensement sur la question. Voir une première mouture : « L'enseignement de l'informatique en France et à l'étranger »
http://www.epi.asso.fr/revue/docu/d0912b.htm.

[3] Rappelons qu'en France il y avait dans les années 80 une option informatique dans l'enseignement général, présente dans un lycée sur deux et en voie de généralisation avant qu'elle ne soit supprimée une première fois en 1992.

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Association EPI
Janvier 2010

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