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Rencontres de l'Orme : faut-il créer un enseignement d'informatique ? Et comment recruter les enseignants ?

Paru sur Touteduc, dans Scolaire, Périscolaire le vendredi 22 mai 2015.

   Les rencontres de l'ORME 2015 ont été l'occasion de débats assez vifs, bien que chacun s'efforce de garder un fleuret moucheté, sur le thème : « faut-il ou non créer une discipline informatique ? Quelle doit être la place du numérique dans les enseignements ? » Voici les principaux arguments qui ont été échangés au cours de deux tables rondes, le mercredi 20 mai. 

   Jean-Yves Capul représentait la DNE, la direction du numérique pour l'éducation (au ministère). Pour lui, « le numérique est partout » et l'éducation au numérique doit donc être « prise en charge pour l'ensemble des niveaux scolaires », ce dont témoigne la création d'un référentiel, le B2I. La France est, de ce point de vue, « pionnière » puisqu'elle a choisi de ne pas avoir de corps enseignant dédié : « c'est l'affaire de tous les enseignants. »

   L'introduction massive du numérique s'inscrit parmi d'autres innovations : l'approche par les compétences, l'auto-évaluation et tout ce qui tend à rendre l'élève acteur de ses apprentissages... Jean-Yves Capul fait de plus remarquer que, « pour la première fois » avec la « refondation », l'éducation aux médias est inscrite dans la loi et dans le socle. Tous les élèves doivent savoir qu'il existe plusieurs langages et doivent connaître les principes de base de la programmation, ce qui se retrouve notamment dans le projet de programme du cycle 4 au collège. En ce qui concerne le lycée, le président de la République a annoncé un plan important, avec l'extension à toutes les séries de terminale de l'enseignement de spécialité « informatique et sciences du numérique », et une réflexion sur la classe de seconde. Dans le premier degré, l'enseignement de l'informatique n'est pas rendu obligatoire, mais le ministère a suscité un certain nombre de dispositifs pour qu'il trouve toute sa place dans les TAP, les activités périscolaires générées par la réforme des rythmes scolaires. Il devance ainsi à l'objection, ce qui n'est pas évalué n'est pas enseigné. Ce qu'il résume en une formule, l'informatique est présente dans tous les programmes, c'est un enseignement et non une discipline. « Le numérique dépasse le numérique, plus aucune discipline ne peut y échapper. »

   Mais pour Gilles Dowek, il est absurde de penser qu'on doive enseigner « le code », et de réduire l'informatique à la programmation (voir ToutEduc), il s'agit bien d'une forme spécifique de culture, donc d'une discipline. Il ajoute qu'aux Pays-Bas, les enseignants d'informatique sont formés à travailler en équipe, ce qui est le mode normal de travail des informaticiens. Ils font donc travailler leurs élèves en équipe et ils entraînent leurs collègues des autres disciplines lorsque ceux-ci constatent leurs succès.

Recruter des enseignants

   Mais se pose aussitôt une autre question, comment recruter des enseignants ? Michel Perez, inspecteur général de l'Éducation nationale, fait remarquer qu'il est déjà difficile de recruter des professeurs de mathématiques ! Il propose plutôt l'introduction d'un enseignement dans les MEEF (les master enseignement des ESPE) avec des référentiels « numérique et informatique ». Colin de la Higuera (université de Nantes) conteste, le vivier des professeurs de mathématiques et celui d'éventuels professeurs d'informatique ne sont pas les mêmes. Il a des étudiants en informatique qui veulent devenir enseignants, et non pas ingénieurs, et à qui il est obligé de répondre que ce n'est pas possible, à moins d'être animateurs dans le cadre des activités périscolaires. Il concède que dans les pays, Israël, Grande-Bretagne, ou les Länder, comme la Bavière, qui ont créé un corps enseignant spécifique, « ça a été dur » au début, il y a dix ans, mais maintenant, affirme-t-il, le renouvellement se fait sans problème. 

   Monique Grandbastien (université de Lorraine) voit que de nombreux professeurs de technologie ne demanderaient pas mieux que de changer de discipline, mais ils n'y sont pas prêts, il faut leur donner la formation complémentaire nécessaire pour les amener à Bac+5. Les enseignants qui assurent aujourd'hui l'enseignement de spécialité sont des passionnés. Mais comment assurer le renouvellement, s'inquiète Colin de la Higuera.

   Pour Sophie Viger, directrice de la Web@cadémie, il est en tout cas « vraiment dommage qu'on ne profite pas du numérique pour modifier radicalement la pédagogie », car ce qui compte, c'est d'« apprendre à apprendre, d'apprendre à se poser les bonnes questions, à se demander ce que l'on veut réellement, à s'auto-évaluer, à créer son propre cadre... » Hubert Lalande, venu d'Ontario, se pose aussi la question, comment « assurer ce virage au numérique » ?

Communiqué par Pascal Bouchard - ToutEduc : http://www.touteduc.fr/
111, avenue Ledru-Rollin 75011 Paris FRANCE
Abonnement : http://www.touteduc.fr/fr/tarifs

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Association EPI
Juin 2015

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