Perspectives et limites d'une simulation :
vers un rapport d'intelligibilité à l'expérience de physique

My Mohamed El Yaakoubi, Said El Jamali, Mohamed Bahra, Mohamed Talbi
 

Résumé

   Dans cet article nous examinons le rapport que devrait avoir l'enseignant de physique aux Technologies de l'Information et de la Communication Éducative (TICE). À ce propos, nous distinguons un rapport d'utilisation et un rapport de production ; par ailleurs, nous distinguons aussi deux types de rapport à l'expérience de physique : un rapport de maîtrise et un rapport d'intelligibilité. Nous montrons alors comment ce dernier rapport découle du rapport de production aux TICE et non du rapport d'utilisation à ces dernières. Dans cette optique, nous avons développé un cédérom qui présente des simulations de quelques expériences en mécanique. Il s'agit donc de contribuer au renforcement de cette tendance qui consiste, pour l'enseignant de physique, à produire ses propres supports multimédias, visant ainsi le transfert à l'élève des compétences liées à la modélisation.

Introduction

   L'exploitation des TICE constitue un fond inépuisable de ressources en supports didactiques et en pratiques pédagogiques dans l'enseignement des sciences. Une multitude de recherches faites dans ce domaine concernent l'utilisation des simulations informatiques dans les pratiques expérimentales en classes de physique. C'est dans ce même cadre que nous avons mené une étude portant sur une analyse des besoins en simulation de quelques expériences en mécanique. Les grandes lignes de cette recherche ont été exposées dans un article intitulé : Le recours à la simulation informatique : un besoin réel ou superflu ? [1]

   À partir de nos résultats, nous nous sommes persuadés que malgré l'abondance des logiciels qui traitent la simulation en général, et la simulation des phénomènes ayant trait à la mécanique en particulier, tout enseignant devrait en produire pour les raisons suivantes :

  • les applications des TICE interpellent tout enseignant qui cherche à savoir comment ça marche et qui essaye d'agir pour que ça marche mieux ;

  • les programmes d'enseignement en sciences physiques et les pratiques expérimentales qu'ils proposent, montrent une forte volonté pour l'intégration des simulations informatiques ;

  • les logiciels de simulation existant sur le marché ne sont pas adaptés aux curricula marocains et ne sont guère appropriés aux besoins des élèves ;

   Nous avons donc constaté l'existence d'un fort besoin du secteur éducatif marocain quant aux outils d'apprentissage multimédia adaptés au programme marocain et qui répondent aux exigences des enseignants et des besoins des apprenants.

   D'où le fort intérêt de répondre au besoin en formation initiale et continue dans l'informatique pédagogique pour les élèves-professeurs et les enseignants. Cette formation doit avoir comme objectif celui de faire passer le rapport des enseignants aux TICE, d'un rapport d'utilisation à un rapport de production (Bahra, 2002). Il est donc nécessaire de savoir lequel des rapports aux TICE, le système didactique a-t-il tendance à développer chez les enseignants, un rapport de production ou d'utilisation ? Surtout si l'intelligibilité de l'expérience de physique exige la participation active de l'enseignant dans la production d'outils didactiques par le moyen des TICE.

   Cette question ayant trait aux rapports aux TICE nous ramène à celle du rapport de l'enseignant à l'expérience de physique. Ainsi, au-delà d'une utilisation naïve de ces outils ; celui-ci devrait participer au processus de leur production, et ce, en pensant également à leur intégration dans l'expérience de physique.

   Bref, nous pensons que l'avenir du métier d'enseignant serait dans la participation active dans la production des usuels d'enseignement de différentes sortes y compris les TICE. Dans le même sens d'idées, Jean-Pierre Archambault (2004) précise que l'on doit mettre l'accent sur la formation (initiale et continue), non pour inciter les enseignants à reproduire des recettes acquises par compagnonnage, méthode dont on connaît les vertus et les limites, mais pour lui permettre d'acquérir une connaissance du métier en même temps que les moyens de l'exercer.

   Dans le but d'illustrer l'influence que pourrait avoir le rapport de l'enseignant aux TICE sur son rapport à l'expérience, nous avons pensé à l'élaboration d'un cédérom multimédia qui simule les expériences programmées dans le chapitre « Mouvement d'une particule soumise à une force constante ». Par cette production, nous ne cherchons pas à remplacer les expériences réelles, mais à montrer la nécessité de les compléter de façon à rendre intelligible les phénomènes qu'elles sont censées faire appréhender. C'est ainsi qu'après avoir montré quelques limites des expériences réelles programmées dans ce chapitre, nous présenterons le cédérom que nous avons réalisé pour les dépasser. Ensuite, nous conclurons cet article par une évaluation technique et pédagogique de l'outil en vue de relever les points faibles à traiter ultérieurement.

1. Analyse des expériences proposées dans le manuel scolaire

   Cette analyse concerne le chapitre « Mouvement d'une particule soumise à une force constante ». Plusieurs connaissances en termes de pré-requis sont à mobiliser chez les apprenants : notion de repère, vitesse, accélération, centre d'inertie, relation fondamentale de la dynamique et théorème de l'énergie cinétique...

   Deux expériences sont programmées dans la partie des travaux pratiques de ce chapitre :

  • Étude du mouvement d'une bille lancée avec une vitesse initiale horizontale (figure 1).


Figure 1 : Dispositif expérimental pour l'étude du mouvement d'une bille
lancée avec une vitesse initiale horizontale [2].

  • Étude du mouvement d'une charge dans un champ électrostatique uniforme (figure 2).


Figure 2 : Dispositif expérimental montrant l'effet d'un champ électrostatique uniforme
sur un faisceau d'électrons.

   Il est à souligner qu'à l'issue d'une enquête auprès d'un groupe d'enseignants, l'analyse de leurs pratiques [3] a montré que plusieurs contraintes réduisent le rendement didactique de cette partie du programme ; il s'agit notamment de :

  • La non disponibilité ou l'état détérioré du matériel destiné à ces expériences.

  • L'insuffisance du temps alloué à l'enseignement de ce chapitre.

  • Le pré-acquis des élèves souvent en deçà des pré-requis.

  • L'effectif très élevé dans les classes.

   En plus, on peut noter les constats suivants :

a) Concernant la première expérience

   Le dispositif de la 1re expérience permet de traiter uniquement un lancement avec une vitesse initiale horizontale ; et ne permet pas de modifier les paramètres du mouvement (la vitesse initiale et l'angle initiale du lancement et la gravité) pour tester leur effet sur la trajectoire de la bille (figure 3).


Figure 3 : Trajectoire de la bille étudiée dans la première expérience.

b) Concernant la deuxième expérience

   Le dispositif disponible au laboratoire concernant cette expérience permet de visualiser la trajectoire des électrons soumis à un champ électrostatique uniforme (figure 4). Mais, il ne révèle pas la trajectoire des électrons en dehors du champ électrostatique. Les apprenants ont du mal à imaginer qu'en dehors du champ électrostatique les électrons poursuivent leur mouvement dans une trajectoire rectiligne.


Figure 4 : Trajectoire des électrons soumis à un champ électrostatique uniforme.

   Avant de présenter notre outil de simulation informatique qui viserait le dépassement de ces failles constatées dans les expériences que nous avons examinées, il est convenable de débattre des questions qui nous amènent à s'intéresser à la relation qui doit entretenir l'enseignant avec les TICE en égard à la nature de l'expérience de physique.

2. Quel rapport aux TICE pour quel rapport à l'expérience de physique ?

   Lorsqu'on parle de l'intégration des TICE et plus particulièrement des simulations informatiques comme aide didactique à l'expérimentation, on est amené à se demander :
Quelle influence, le rapport de l'enseignant aux TICE aurait-il sur l'intelligibilité des expériences de physique ?

   Du côté des pratiques didactiques actuelles, la tendance serait d'intégrer les technologies relatifs aux dispositifs expérimentaux utilisés en milieu scolaire, comme médium de l'enseignement de la physique, sans prendre les précautions nécessaires pour que ce médium ne transforme les activités où il intervient en préconstruits didactiques en réduisant l'acte d'enseignement à de simples désignations monstratives (Johsua et Dupin, 1993). L'élève est ainsi mis dans des situations de réception. Quant à l'enseignant, en ayant recours à un matériel conçu par d'autres, il est contraint de se limiter à une utilisation béate de ce matériel. Par voie de conséquence, son rapport à l'expérience de physique se limiterait à un rapport de maîtrise, dans le meilleur des cas, sans aucune perspective pour faire évoluer cette relation à un rapport d'intelligibilité.

   Du point de vue épistémologique, inscrire les TICE dans une optique de production de simulations, significatives pour l'élève, de divers phénomènes étudiés en physique, c'est disposer de variables de commande relatives à une expérience donnée. L'activation de telles variables par l'enseignant, lui permet de prendre en compte toutes les virtualités imaginables, dans la perspective de donner à l'élève la possibilité de rencontrer toutes les questions sans lesquelles l'investigation scientifique qu'il doit opérer ferait défaut, et de faire, par suite, le tour complet de ces questions.

   En somme, l'expérience réelle exhibe un modèle physique souvent très particulier, et qui alors occulte des variables de commande que le professeur doit avoir à sa disposition afin de tenir compte de toutes les éventualités et de tous les états de figures. Par contre, la simulation informatique, quant à elle, porte sur un modèle abstrait et réalise les différentes virtualités qu'elle rend accessible au manipulateur. Ainsi, on peut définir avec ces simulations, un modèle physique plus visuel, qui permet à l'apprenant d'induire des règles par l'expérimentation virtuelle (Nonnon, 1998). Mais, pour que le professeur puisse utiliser de manière optimale toutes les variables de commande qu'offre une simulation informatique, il est nécessaire qu'il participe directement ; sinon du moins indirectement à la conception de celle-ci, de sorte que son rapport aux TICE ne se limite pas à un rapport d'utilisation, la relation avec les TICE devrait donc s'élever au niveau du rapport de production. Autrement dit, c'est par un rapport de production aux TICE, que les situations d'enseignement-apprentissage fondées sur la transmission verbale des connaissances pourraient donc reculer au profit d'un rapport d'intelligibilité, pour l'enseignant et ses élèves, de l'expérience de physique et de la modélisation qui revêtent une importance capitale dans les processus d'élaboration et d'acquisition du savoir scientifique.

3. Conception et réalisation d'un cédérom de simulation des expériences

   Les simulations que nous proposons dans notre cédérom sont conçues pour compléter les expériences réelles proposées dans le manuel scolaire. Elles peuvent être utilisées dans les séances du cours, les séances des travaux pratiques ou à domicile par les élèves.

   Afin de répondre à leurs besoins, les utilisateurs éventuels de toute simulation (élèves, enseignants, didacticiens) doivent être impliqués dans sa conception.

3.1. Conception

   Les apprenants sont touchés en tant qu'utilisateurs finaux du logiciel éducatif, les enseignants sont concernés en tant que prescripteurs (ils choisissent le logiciel qu'ils utilisent dans leurs classes) et les didacticiens sont concernés par la conception du logiciel, à la fois en tant qu'experts du contenu ou de la méthode d'enseignement utilisée et en tant que prescripteurs auprès des enseignants.

   En ce qui nous concerne, et pour assurer une meilleure intégration des simulations conçues au contexte de leur utilisation, nous avons opté pour une méthode de conception qui implique les différents acteurs concernés par le produit. C'est la méthode de conception différenciée proposée par Jean-Daubias (2004). Cette méthode consiste à associer une démarche adaptée à chaque type d'interlocuteurs des informaticiens (figure 5).


Figure 5 : Degré de participation à l'équipe de conception selon le type de l'interlocuteur (Jean-Daubias, 2004)

Conception centrée utilisateur avec les apprenants. Elle consiste à prendre en compte l'élève dans la conception du logiciel. Cette approche place l'apprenant et la tâche qu'il doit effectuer au centre de la démarche de conception. Il est observé dans ses comportements de résolution, interrogé sur ses attentes quant au logiciel à concevoir.

Conception informative avec les enseignants. Les tâches et les attentes des apprenants, comme dans la plupart des cas, ne sont pas totalement et clairement définies. Donc la conception centrée utilisateur ne suffit plus. Alors, il est nécessaire de faire appel aux enseignants, en tant qu'informateurs dans la conception, et aussi en tant qu'utilisateurs.

Conception participative avec les chercheurs (didacticiens). La démarche de conception participative propose d'associer les chercheurs en didactique au processus de conception, dès le début du projet, en partant du principe, qu'ils savent ce dont ils ont besoin et qu'ils peuvent aussi avoir des idées novatrices (Jean-Daubias, 2004).

3.2. Réalisation technique du cédérom

   Les simulations que nous présentons mettent à la disposition de leur manipulateur des variables de commande afin d'assurer une interactivité maximale et de tenir compte des éventualités et des états de figures possibles. La diversité des ressources dont dispose le cédérom (du texte, des images, des vidéos et des programmes exécutables) a donc nécessité le recours à plusieurs types d'outils :

* Langage de programmation Borland Delphi 6.0

   Nous avons utilisé le logiciel Borland Delphi version 6.0 qui est un langage de programmation événementiel et orienté objet. Le choix de ce logiciel n'a pas été arbitraire, puisqu'il offre au programmeur une interface simple à gérer et il dispose d'un langage qui a une syntaxe proche de celle du langage Pascal, qui est un langage très simple et largement utilisé. En plus, il met à la disposition des programmeurs un ensemble d'objets consistants, simples à manipuler et qui ne posent pas problème de portabilité. Concernant les objets utilisés pour l'élaboration de ces simulations, en plus des objets classiques (boutons, labelles, des barres de défilement, etc.), nous avons fait appel principalement aux objets :

  • Tchart : c'est une composante principale de la deuxième simulation. Cet objet offre une solution pour le traitement des graphes : ajouter une courbe au graphe, changer la base de représentation des courbes, effacer les courbes, modifier les paramètres d'une courbe...

  • Timage : cet objet est la base de la troisième simulation. Il présente une propriété qui peut contenir une image et il donne la possibilité d'y faire des modifications en agissant directement sur ses pixels via des commandes particulières. Ainsi, pour dessiner la trajectoire des électrons, on utilise ces commandes pour mettre des points dans l'emplacement qui convient, de sorte à avoir une courbe de forme parabolique entre les plaques (au sein du champ électrostatique) et rectiligne en dehors de ces plaques.

* Autres outils

   Outre les programmes exécutables, cette application contient aussi des animations des images des vidéos et du son. Pour traiter ces différents types de média, nous avons utilisé l'outil de :

  • traitement des images Adobe Photoshop ;

  • traitement de son Cool Edit ;

  • traitement des vidéos Ulead vidéo studio version 9 ;

  • réalisation des animations Macromedia Director 8.5.

   Enfin, pour regrouper tous les produits réalisés avec ces outils dans une seule application, dans un ordre qui facilite la compréhension sous forme d'étapes soigneusement préparées, nous avons utilisé le logiciel Multimedia Builder 4.9.

4. Description du produit final

   Le cédérom présente trois simulations.

4.1. Première simulation : lancer une bille avec vitesse initiale horizontale

   Il s'agit d'une simple animation (figure 6) réalisée par Macromedia Director 8.5. Son but est de préparer les élèves avant le passage à la réalisation des expériences réelles, en leur expliquant les objectifs de cette expérience et le fonctionnement du dispositif qu'ils vont trouver au laboratoire.


Figure 6 : 1re simulation.
  1. Bouton 'Lancer' pour commencer la simulation.

  2. La bille simulée dont on étudie le mouvement de la chute.

4.2. Deuxième simulation : lancer un projectile avec une vitesse initiale quelconque.

   Cette simulation permet d'illustrer l'expérience de chute libre parabolique d'une particule dans un champ gravitationnel uniforme. Elle permet ainsi de visualiser la trajectoire du projectile et de déduire l'effet des conditions initiales du lancement (angle initial du lancement, vitesse initiale, gravité) sur son mouvement.

L'interface utilisateur de la deuxième simulation

   Les figures 7 et 8 donnent un aperçu sur les différentes variables de commande que cette simulation met à la disposition de l'enseignant et de l'apprenant.


Figure 7 :Les différentes fonctionnalités de la deuxième simulation.

  1. Des variables de commande pour introduire les paramètres initiaux du mouvement (la vitesse initiale, l'angle de lancement, la gravité).
  2. Bouton pour lancer le projectile rouge.
  3. Bouton pour avoir les résultats du lancement (les coordonnées du sommet et la portée).
  4. les trajectoires des trois projectiles.
  5. Bouton pour effacer le graphe.
  6. Bouton qui permet d'afficher une boite de commande pour le paramétrage de l'interface (voir figure 8).
  7. Axe des ordonnées (la hauteur maximale affichée dans cet exemple est de 12m).
  8. Axe des abscisses (la longueur maximale affichée dans cet exemple est 25m).
  9. Zone de texte pour le réglage de l'échelle des abscisses.
  10. Zone de texte pour le réglage de l'échelle des ordonnées.
  11. Zone de texte pour le réglage de la densité des points affichés.
  12. Curseur pour ralentir le mouvement du projectile.
  13. Bouton pour valider les changements effectués.
  14. Bouton pour imprimer le tracé de la courbe.
Figure 8 : Outils de paramétrage de l'interface.

   Cette simulation donne la possibilité de visualiser plusieurs projectiles lancés avec des conditions initiales différentes. Par conséquent, en faisant des comparaisons, l'élève peut percevoir l'effet du changement des paramètres du lancement sur les caractéristiques de la trajectoire. Par exemple : l'effet de la vitesse initiale (figure 9) ou l'effet de l'angle du lancement (figure 10) sur la portée ou sur le sommet.


Figure 9 : Simulation de l'effet de la vitesse du lancement sur la portée et sur le sommet.
En modifiant la vitesse initiale on peut remarquer que plus la vitesse est grande
plus le sommet et la portée sont importants.


Figure 10 : Simulation de l'effet de l'angle initiale sur la portée et sur le sommet.
En modifiant l'angle du lancement on peut remarquer que l'angle 45° donne la meilleure portée et que plus l'angle est grand plus le sommet est grand.

4.3. Troisième simulation : mouvement d'un électron soumis à un champ électrostatique uniforme

   Cette simulation permet d'illustrer le mouvement des électrons dans un champ électrostatique uniforme. Elle permet de remédier aux limites de l'expérience réelle qui ne répond pas totalement aux questions des élèves. En effet, l'expérience réelle ne permet de visualiser la trajectoire des électrons qu'au sein de champ électrostatique, qui est une trajectoire parabolique. Les élèves doivent donc imaginer et comprendre que la trajectoire des électrons en dehors du champ électrostatique devient rectiligne. Cette simulation montre bien ce phénomène en mettant en deux couleurs différentes (rouge et noire, voir figure 11) les deux parties de la trajectoire (au sein et en dehors du champ électrostatique). Elle peut donc être bénéfique aux apprentissages des élèves, notamment si son utilisation a lieu après l'expérience réelle.

L'interface utilisateur de la troisième simulation

   La figure 11 montre les différentes fonctionnalités de la troisième simulation.


Figure 11 : Mouvement des électrons au sein puis en dehors d'un champ électrostatique uniforme.

  1. Les deux plaques entre lesquelles est créé un champ électrostatique uniforme (E).
  2. Bouton pour allumer ou éteindre la machine.
  3. Zone pour introduire la valeur de la vitesse initiale des électrons (l'utilisateur peut introduire directement la valeur dans la zone de texte comme il peut utiliser le curseur pour sélectionner la valeur désirée).
  4. Zone pour introduire la valeur du champ électrostatique entre les plaques.
  5. la trajectoire des électrons au sein du champ électrostatique (trajectoire parabolique en couleur rouge).
  6. la trajectoire des électrons en dehors du champ électrostatique (trajectoire rectiligne en couleur noire).

5. Ébauche d'une évaluation du cédérom

   Durant l'étape de conception et de réalisation, nous avons procédé à des expérimentations ergonomiques afin de mieux connaître et appréhender l'activité des futurs utilisateurs. Ces expérimentations ont été menées en étroite collaboration avec deux enseignants des sciences physiques interpellés par l'intégration des TICE dans leurs pratiques pédagogiques. Ces expérimentations avaient la fonction de prévoir les modalités des utilisations futures pour proposer des aménagements ergonomiques (Pinsky, 1992) qui s'appuient sur l'analyse des difficultés repérées chez les utilisateurs ainsi que sur leurs propres propositions.

   Les critères concernant un support multimédia pédagogique dédié à l'enseignement et à l'apprentissage ont été étudiés au sein du laboratoire LIRADE-TIE(2005) [4]. Dans le cadre de cette recherche, une grille interactive d'évaluation de supports multimédias a été élaborée. Cet environnement d'évaluation a été conçu pour assister les concepteurs dans l'évaluation de prototypes ou pour guider les enseignants dans le choix des supports multimédias à utiliser dans leurs classes.

   Ainsi, pour évaluer notre cédérom, nous avons fait appel à cette grille d'évaluation interactive. Cette dernière propose à l'évaluateur un menu dans lequel il doit choisir les critères et les sous critères à évaluer. Ensuite, l'évaluateur doit répondre aux questions posées par la grille (les questions concernent les critères qu'il a choisis d'évaluer). Enfin, la grille propose à l'évaluateur une note générale (sur 20) calculée à partir des réponses de l'évaluateur et un graphe qui décrit les performances de cédéroms.

   Toute évaluation nécessite au moins de poser les trois questions classiques :

  • Qui évalue ?
  • Qu'évalue-t-on ?
  • Quand évalue-t-on ?

   Dans notre cas l'évaluateur sera le concepteur du support multimédia. L'évaluation se base sur des dimensions, ergonomiques, multimédia et pédagogique ; L'évaluation est appliquée essentiellement au produit fini et porte directement sur le support multimédia (et non sur son impact a posteriori).

   Parmi les critères que nous avons évalués, on trouve :

  • Le guidage : dans ce cédérom, l'utilisateur est guidé tout au long de sa navigation par des icônes significatives et des interfaces traditionnelles.

  • L'homogénéité : c'est le maintien (dans l'ensemble du support à évaluer) d'une charte graphique qui assure la cohérence du support. Concernant notre support, toutes les fenêtres ont une forme standard. En plus, il y a une certaine cohérence entre les icônes proposées sur l'écran et leur fonction.

  • La navigation : concernant le système de navigation adopté dans ce cédérom, l'utilisateur ne peut pas se situer par rapport à ce qu'il a déjà vu et ce qu'il peut encore aller voir, en plus, notre support conçu ne contient pas de liens extérieurs.

  • L'environnement pédagogique (activité) : afin d'améliorer le processus d'apprentissage, il est pertinent d'introduire dans un support multimédia pédagogique, plusieurs types d'activités pédagogiques comme par exemple, les activités de résolution de problèmes, la communication, les expérimentations, le suivi des apprenants pendant le processus d'apprentissage... Concernant les expérimentations, notre support propose des simulations complètements paramétrables. Cependant, il sera plus bénéfique si ces simulations sont exploitées dans des situations problèmes et si le cédérom propose des exercices d'applications interactifs.

   Cette évaluation nous a montré quelques points faibles du produit qui doit donc être amélioré. Cette amélioration doit reposer davantage sur le système de navigation et sur l'environnement pédagogique en proposant plus d'activités qui peuvent rendre l'apprenant plus actif et faciliter son apprentissage.

Conclusion

   Malgré leurs limites, les expériences réelles restent nécessaires dans l'apprentissage des sciences physiques. En effet, ces expériences développent des aptitudes et des savoir-faire qui sont utilisables dans des situations problèmes réelles (Hebenstreit, 1992), comme la lecture des appareils de mesure, l'ajustement de la position de divers boutons, la mesure de différentes valeurs physiques : masse, température, distance, temps écoulé...

   Notre choix d'associer la réalisation des expériences de physique à la production de supports multimédias pédagogiques est, d'une part, une réponse aux orientations de la charte nationale de l'éducation et de la formation ; lesquelles orientations incitent à la promotion et au développement des TICE en tant que pratiques pédagogiques innovantes au Maroc. D'autre part, au-delà de toute approche utilitaire qui consiste uniquement à répondre aux exigences des enseignants et aux besoins des élèves marocains, nous défendons l'idée selon laquelle le développement, chez l'enseignant, d'un rapport d'intelligibilité aux expériences de physique exige l'implication de celui-ci dans le processus de production des TICE dédiées à l'enseignement de la physique.

   Le logiciel de simulation que nous proposons constituerait une ébauche d'une ingénierie didactique portant sur la représentation et l'analyse de phénomènes physique divers.

My Mohamed El Yaakoubi *
melyaakoubi@gmail.com

Said El Jamali **
saideljamali@gmail.com

Mohamed Bahra ***
bahra5@caramail.com

Mohammed Talbi *
maarifcentre@yahoo.fr

* Laboratoire Interdisciplinaire de Recherches : Apprentissage, Didactique, Evaluation & Technologies de l'Information pour l'Education (LIRADE-TIE), Faculté des Sciences Ben M'Sik.

** Unité de Recherche en Education et en Formation (UREF), centre pédagogique régional Derb Ghalef, Casablanca.

*** Cellule d'Observation et de Recherche en Enseignement des Sciences et Techniques (COREST), centre pédagogique régional Derb Ghalef, Casablanca.

Références

Archambault, J.-P., Drechsler, M. (2004). Des enseignants auto-producteurs ; Médialog, n° 52, décembre 2004.
http://www.epi.asso.fr/revue/articles/a0501a.htm.

Bahra, M. (2002). Quel rapport de l'élève marocain au NTIC ? ; 2ème Biennale de Remadis 2002, Casablanca.

Jean-Daubias, S. (2004). De l'intégration de chercheurs, d'experts, d'enseignants et d'apprenants à la conception d'EIAH ; Le colloque TICE 2004 organisé par CNRS.
http://archive-edutice.ccsd.cnrs.fr/edutice-00000708.

El Yaakoubi, M., El Jamali, S., Akrim, H, Talbi, M. (2006). Le recours à la simulation informatique : besoin réel ou superflu ? ; EpiNet n° 82 , février 2006.
http://epi.asso.fr/revue/articles/a0602c.htm.

Hebenstreit, J. (1992). Rencontre du troisième type : simulation et pédagogie ; Actes du colloque : L'intégration de l'informatique dans l'enseignement et la formation des enseignants, les 28-29-30 janvier 1992 au CREPS de Châtenay-Malabry, INRP-EPI, Paris.
http://www.epi.asso.fr/revue/dossiers/d12p080.htm.

Johsua, S. et Dupin, J.-J. (1993). Introduction à la didactique des sciences et des mathématiques ; Paris : PUF.

Nonnon, P. (1998). Intégration du réel et du virtuel en science expérimentale ; 8ème Journées Informatique et Pédagogie des Sciences Physiques, Montpellier 1998.
http://www.inrp.fr/Tecne/Rencontre/Jipsp8/Pdf/Nonnon2.pdf.

Pinsky, L. (1992). Concevoir pour l'action et la communication ; Berne : Peter Lang.

Sadiq, M. (2005) ; Méthode d'évaluation érgopédagogique des supports multimédias ; Mémoire de DESA (non publié) ; Faculté des sciences Ben M'Sik Casablanca.

NOTES

[1] Article publié dans la revue EpiNet n° 82, février 2006.

[2] Les figures 1, 2, 3, 4, sont tirées du manuel scolaire des sciences physiques. 3ème année secondaire (Classe Terminale). Série Sciences Mathématiques. Librairie des écoles. Casablanca. 1996.

[3] Notre article mentionné, ci-dessus note 1, a fait le point sur un tel aspect.

[4] Une recherche réalisée par M. Sadiq sous l'encadrement de M. Talbi pour l'obtention d'un DESA en « Pédagogie de l'enseignement supérieur et technologies de l'éducation et de la formation » à l'Université Hassan II Mohammedia, Faculté des Sciences Ben M'Sik, Casablanca.

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Association EPI
Mai 2006

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