LE PLAN D'ÉQUIPEMENT Mariola Ganko-Karwowska Parmi d'autres effets, le lancement du PAGSI en janvier 1998 a mis les écoles, les collectivités territoriales et les académies face à la nécessité de préparer, avant la fin de l'année scolaire 1997/1998, une conception cohérente de l'introduction des TIC dans les écoles élémentaires. Le « plan Multimédia dans les écoles », lancé et mis en oeuvre à partir de juin 1998 dans une agglomération de Rhône-Alpes, « Saint-Étienne Métropole » (SEM), au sud du département de la Loire, constitue un exemple de telles actions. Il est difficile de dire combien de plans ont été élaborés et réalisés dans toute la France. On peut supposer que le plan de SEM est l'une des nombreuses actions entreprises pour réaliser les plus importants objectifs et les postulats du PAGSI et du S3iT. Dans l'article ci-dessous, j'essaie de faire apparaître les actions entreprises par les écoles, la collectivité locale (SEM) l'Inspection d'Académie et les structures d'accompagnement (CDDP, etc.) qui font ensemble des efforts pour préparer la plus jeune génération à participer sciemment et de façon responsable à la construction de la société de l'information. Je présente le matériel de la recherche, recueilli grâce à la méthode d'entretiens, d'observations et d'analyse documentaire, en le disposant selon l'importance de mes réflexions, au sujet de l'équipement des écoles en technologie moderne. Saint-Étienne Métropole est l'une des deux communautés d'agglomération du département de la Loire et l'une des dix les plus importantes de tout le pays. Elle se trouve en région Rhône-Alpes, et appartient à l'Académie de Lyon. Cette remarque nous semble être primordiale parce qu'elle permet de déterminer les possibilités financières de cette agglomération, ce qui n'est pas sans importance, au vu de nos réflexions. J'examine avec attention avant tout l'enseignement du premier degré (les écoles élémentaires et les écoles maternelles) parce que le financement de telles entreprises comme l'équipement des écoles en ressources pédagogiques, éducatives, ainsi que les réparations sont à la charge des collectivités locales (et donc des communes, en ce qui concerne les écoles) De la condition financière de la commune dépend directement la possibilité d'équiper les écoles, entre autre en technologie moderne. Bien que le postulat du PAGSI en matière d'équipement des écoles en TIC soit reconnu comme prioritaire, toutes les communes n'ont pu faire face aux exigences demandées. Saint-Étienne Métropole est une « communauté de communes », devenue depuis « communauté d'agglomération », née en 1995 à l'initiative des élus. Son but principal consiste à entreprendre, organiser et financer en commun diverses actions pour le développement régulier et constant de l'agglomération. À présent, SEM regroupe 43 communes (environ 400 000 habitants) avec 321 écoles (199 écoles élémentaires dont 143 écoles publiques et 56 écoles privées, et 122 écoles maternelles dont deux privées) qui accueillent environ 40 000 élèves et emploient 1700 enseignants. Au début de son existence, SEM ne regroupait que 27 communes, 173 écoles élémentaires (128 écoles publiques et 45 privées) où 900 enseignants étaient employés. Parmi ces actions communes, l'une des premières et plus importantes a été le « plan Multimédia dans les écoles », dont SEM a pris l'initiative au printemps 1998. Ce plan couvre les frais de l'installation et de l'entretien des équipements techniques et de l'infrastructure de communication Après les changements de la structure administrative de l'agglomération, nous devons évoquer les deux étapes du plan « Multimédia dans les écoles » : La première étape élaborée en 1998, pour la mise en oeuvre des TIC dans les écoles élémentaires devait prendre trois ans, comme l'avait suggéré l'un des postulats du PAGSI. Sa réalisation a commencé avec la rentrée scolaire 1998/1999 et son achèvement prévu pour la fin de l'an 2001. Cette étape a pris fin à la fois car ses objectifs étaient globalement atteints pour les communes alors membres de SEM, et car les « marchés publics » qui en permettaient la réalisation ont pris fin eux aussi. La deuxième étape a été préparée au cours de l'année 2002, pour les années 2003-2005 et est en train d'être réalisée. Elle s'est révélée nécessaire pour faire bénéficier des objectifs initialement fixés les communes nouvellement adhérentes, suite à l'extension géographique de SEM, liée à la prise de conscience par les communes « extérieures » de leur intérêt à rejoindre SEM, mais aussi pour fixer de nouveaux objectifs, parmi lesquels l'équipement des écoles maternelles. La bonne réalisation d'actions telles que le plan Multimédia dans les écoles, repose nécessairement sur un partenariat, un dialogue, que la collectivité initiatrice doit établir avec les divers acteurs du système éducatif, selon les compétences de chacun . Dans le cas du plan de SEM les partenaires principaux ont été :
De cet « organigramme » du plan Multimédia dans les écoles résulte la constatation que c'est une opération à multiples aspects, qui exige la coopération de diverses institutions et organisations. Qui plus est, cette opération évolue car elle est soumise aux modifications de la structure de l'agglomération, et à l'évolution de la conception de l'intégration des TIC dans l'éducation, avec une extension vers les plus bas niveaux (écoles maternelles). Aujourd'hui, on est en 2003. Le bilan intermédiaire de l'équipement des écoles en technologie moderne nous permet de supposer que les indices de l'équipement des écoles de tous les niveaux de l'Éducation nationale ont beaucoup augmenté. Cette supposition semble particulièrement valide pour l'enseignement élémentaire qui, à la fin de 2001, avait le plus bas pourcentage d'équipement en TIC. Il y a beaucoup de raisons à cet état de choses. Parmi elles, selon ce qu'indiquent les gens les plus préoccupés de l'introduction des TIC dans les écoles, la cause la plus importante de ce retard et de la fourniture insuffisante d'équipement en technologie moderne dans les écoles était (et continue d'être) l'insuffisance des moyens financiers des collectivités territoriales (les communes). À l'époque de la marginalisation de l'informatique à l'école (1988-1997) les actions entreprises pour équiper les écoles en ordinateurs avaient plutôt un caractère ponctuel. Les indices d'évolution du nombre d'ordinateurs et de l'accès à l'Internet le prouvent bien. Quelles étaient alors les sources de financement des T.I.C. dans la période qui précédait le PAGSI ? Comment, aujourd'hui, les collectivités locales cherchent-elles à réaliser les objectifs du PAGSI ? Il est difficile de trouver la réponse exacte qui pourrait être universelle pour toutes les collectivités locales en France. On peut quand même présumer que le mécanisme de l'action, pour la plupart d'entre elles, est le même que celui introduit dans le département de la Loire, surtout dans l'agglomération de Saint-Étienne. Les moyens de financement pour l'achat des ordinateurs pour les écoles, avant la mise en place du projet SEM Multimédia dans les écoles, étaient divers. D'après les informations reçues de la part des enseignants dans les écoles visitées et de la part de l'ingénierie éducative du le CDDP à Saint Etienne (M. Jean-Claude Lainé) le financeur principal était la commune. Parfois le maire ou les élus en prenaient l'initiative, dans d'autres cas ils répondaient à une demande des enseignants. Les dépenses pour les achats des TIC étaient alors prises en compte dans le budget de la commune. Le nombre et le genre de matériel étaient différents (Mac, PC) et dépendaient des possibilités financières de la commune. D'autre part, des achats pouvaient être faits par les parents d'élèves, souvent dans le cadre de la « caisse coopérative » de l'école. Il y avait aussi des ordinateurs de récupération qui provenaient soit des parents, soit de personnes privées, soit de la part d'entreprises (souvent des banques) à l'occasion du renouvellement de leur parc vieillissant, mais ils constituaient la moindre partie. En octobre 1998, SEM a annoncé la mise en œuvre d'un projet triennal pour l'équipement progressif des écoles élémentaires en TIC. Ce plan prévoyait l'équipement de toutes les écoles élémentaires de l'agglomération SEM telle qu'existant à l'époque, sur les trois années budgétaires 1999, 2000 et 2001. Au total, 179 écoles élémentaires étaient incluses dans ce projet dont 133 écoles publiques et 46 privées. Jusqu'à la fin de 2001 on a équipé 159 écoles élémentaires (128 publiques et 31 privées), c'est-à-dire 12% de moins par rapport à ce qui était prévu dans le plan. 5 écoles publiques et 15 écoles privées n'ont pas été équipées. Toutefois, les principes du plan ont été réalisés à 88% et leur coût a été d'environ 2,5 M €. Les informations plus détaillées concernant les étapes envisagées et réalisées du plan sont présentées dans le tableau 1. Tableau 1. Les étapes de l'équipement des écoles en TIC. Depuis 1998, c'est-à-dire du moment de la mise en place du projet Multimédia dans les écoles, l'étendue de l'agglomération de Saint Etienne s'est agrandie. De nouvelles communes ont accédé à SEM et automatiquement, le nombre des écoles soumises à SEM a augmenté de 25 (15 écoles élémentaires publiques et 10 écoles élémentaires privées). Par suite de ces changements et le caractère incomplet de la première étape du plan, SEM a préparé une deuxième étape de son plan, pour les années 2002-2005. 122 écoles maternelles y sont prises en considération (dont deux privées). Au total, jusqu'à la fin de 2005, 167 nouveaux sites sont prévus pour être équipés en TIC. Dans le cadre de la première édition de ce plan chaque école a reçu :
L'organisation et le fonctionnement de l'enseignement élémentaire en France ont rendu les écoles petites et « camérales ». La plupart d'entre elles possèdent 5 classes, une pour chaque niveau : CP - cours préparatoire ; CE1 - cours élémentaire 1 ; CE2 - cours élémentaire 2 ; CM1 - cours moyen 1 ; CM2 - cours moyen 2, donc 5 classes dans toute l'école, ce qui signifie aussi au moins 5 pièces pour mener le processus didactique. (Certaines écoles plus grandes consacrent des salles complémentaires à certaines activités, par exemple les arts plastiques, la musique... ou l'informatique ). En France fonctionnent aussi les écoles « à classe unique », c'est-à-dire les écoles qui ne possèdent qu'une ou parfois deux classes intégrant chacune divers niveaux. Dans les grandes villes, telles que Saint-Étienne il y a des écoles qui possèdent aussi plus de classes. Mais le nombre de salles de classe disponibles n'est pas forcément lié à la taille de la commune... les effectifs des écoles ont largement évolué, et des écoles construites parfois il y longtemps quand les communes rurales étaient très peuplées, sont maintenant presque vides, alors qu'ailleurs, dans les communes périurbaines en croissance démographique, il faut construire ou agrandir. L'enfant commence son éducation à l'âge de 2 ou 3 ans, dès la maternelle, et pendant toute la scolarisation au niveau élémentaire, il participe à un processus didactique qui est animé par le même enseignant tout au long de l'année. L'organisation du processus didactique se déroule sous forme des blocs, ce qui signifie que les élèves participent pendant la journée à des cours organisés en deux blocs : le matin - de 8h30 à 11h30 et l'après-midi - de 13h30 à 16h30. D'un autre côté, le S3iT évoque la façon de déployer la technologie informatique. Dans l'établissement : déployer des dispositifs technologiques adaptés... Les enseignants et les élèves souhaitent accéder aux ressources internes et externes de l'établissement dans des conditions matérielles adaptées aux diverses situations pédagogiques, depuis différents espaces de travail : salle de classe, centres de documentation, salles spécialisées (salle de travail autonome pour les élèves, salle de travail pour les enseignements...) [1]. Il en résulte alors que « L'équipement informatique ne se limite plus à une salle spécialisée comme lors du plan IPT de 1985 avec le concept des nanoréseaux. Il s'agit par la mise en réseau de l'ensemble des postes de l'établissement, de permettre l'accès aux ressources aussi bien locales (recherche documentaire, impression, stockage de données...) qu'extérieures (Internet, messagerie...) en salle de classe, en BCD, dans la salle des maîtres, dans les bureaux de direction, etc. » [2]. Si on considère donc à la fois la structure de l'éducation et les indications incluses dans le S3iT, apparaît alors en filigrane les limites de l'équipement des écoles en TIC et la façon de disposer le matériel dans les écoles. La meilleure solution serait en effet de réaliser toutes les indications du S3iT concernant l'équipement des salles didactiques (salles de classe), des bibliothèques, des salles d'enseignants et la création des salles informatiques. Le choix de la stratégie reflétant l'idée « un ordinateur par classe » semble être justifié en prenant en compte la structure du système de l'éducation élémentaire. En revanche, il y a beaucoup d'écoles qui ont des problèmes de locaux et n'ont pas de possibilités de se procurer de la place pour y concentrer le matériel informatique et créer aussi un laboratoire. À l'heure actuelle, SEM est en train de réaliser la deuxième étape du plan Multimédia dans les écoles Le développement rapide de la technologie de l'information est à l'origine des changements dans la technologie du matériel fourni aux écoles élémentaires et maternelles. On a remplacé :
On a complété ce projet par des scanners A4. À côté des écoles élémentaires, la nouvelle étape du plan de SEM a prévu aussi la fourniture des TIC dans les écoles maternelles. Dans le cas des écoles élémentaires encore non équipées, la structure de l'équipement n'a pas changé (5 postes de travail). Par contre une autre stratégie a été prise dans le cas des écoles maternelles. Chacune reçoit ou recevra 2 micro-ordinateurs multimédia PC (pas de câblage, et donc pas de mise en réseau sauf en cas de regroupement dans une même salle, à l'aide d'un routeur switch) et un accès à l'Internet sur un poste au moins par routeur Numeris ou ASDL, parfois partagés avec l'école élémentaire voisine. En plus de la base matérielle, chaque école est ou sera équipée en logiciels nécessaires au bon fonctionnement de l'ordinateur. Les logiciels ont aussi évolué entre les deux « éditions » du plan Selon le plan pour les années 1998-2001, chaque école élémentaire a reçu :
Le nouveau projet prévoit l'introduction à la place de :
Tableau 2. L'image globale de la conception et modifications de l'équipement des écoles en TIC L'état de l'équipement des écoles en TIC et les changements dans la structure de la technologie fournie soulignent avant tout l'allure du développement et du vieillissement des TIC. Tout cela fait naître quelques questions et doutes. Est-ce que nous pourrons, un jour, reconnaître le processus de l'équipement des écoles (pas seulement élémentaires) comme terminé ? Sinon, il semble important de trouver la réponse à la question concernant l'avenir - Quand, avec quels moyens financiers et dans quelles limites sera réalisé l'échange de la technologie de l'information ? Est-ce que, par hasard, la réalisation de la deuxième édition du plan Multimédia dans les écoles n'annonce pas la modernisation du passé ? Le projet SEM ne donne pas la réponse à ces questions et cela n'étonne pas. Ce qui est important c'est ce qu'il y a « ici et maintenant ». Il faut trouver des solutions aux problèmes concernant la recherche et l'« amas » des fonds pour satisfaire aux besoins du présent. À titre de réponse, partielle, à ces questions, on peut dire que :
Je crois que les décideurs de SEM vont affronter un nouveau dilemme. La recherche des solutions pour l'avenir « ici et maintenant » est une condition absolue et une garantie face au danger « d'être toujours en retard ». En même temps, il est difficile de préciser le degré de la « saturation » des écoles de SEM en technologie de l'information. Cette difficulté est augmentée par le manque de registre (tenu par SEM) du matériel informatique présent dans les écoles et acheté grâce aux moyens financiers ne provenant pas du plan réalisé. Et pourtant, c'est ce que je soulignais au début, les écoles disposaient d'ordinateurs avant le lancement du projet SEM. A l'heure actuelle, les mairies, ainsi que les parents d'élèves, aident financièrement à l'achat de matériel au dehors du plan. C'est une aide occasionnelle, et très peu d'écoles la touchent. Pourtant, de telles actions sont entreprises et cela influence directement le nombre d'ordinateurs dans les écoles. Parallèlement à l'action des collectivités, et dans le cadre du projet national déjà mentionné, l'État a mis depuis trois ans à disposition des IA-DSDEN des crédits pour l'informatique. L'objectif est d'aboutir au fait que toutes les écoles élémentaires et maternelles du département aient au moins un ordinateur communicant. Cette action mérite les commentaires suivants :
En prenant en compte le nombre d'élèves dans les classes des écoles élémentaires (20-27 élèves) ainsi que les principes du plan Multimédia dans les écoles, on peut constater qu'à l'heure actuelle l'équipement des écoles de SEM est au niveau de la moyenne nationale de 2000, cela veut dire - 23 élèves par un ordinateur. On peut considérer cet indice comme trop faible surtout au vu des autres sources qui permettent le financement de l'achat des ordinateurs pour les écoles. Le degré d'équipement en ordinateurs n'est cependant que l'un des aspects de la création des conditions favorables pour former les compétences informatiques des élèves et des enseignants et en même temps construire les bases de la société de l'information... Mariola GANKO-KARWOWSKA, mèl : Mariola.Ganko-Karwowska@ip.univ.szczecin.pl NOTES [1] Schéma Stratégique des Systèmes d'information et des télécommunications 2000-2002. M.E.N.R.T., 2002, s. 7. [2] Vincent JEAN, Les TICE à l'école. Bordas / VUEF, Paris 2002. ___________________ |