Les hyperdocuments multimédia à l'École primaire
Outils de structuration des connaissances

Guy Petitot
 

PROJET GLOBAL

     Nous nous intéressons à l'étude des stratégies des élèves, pour structurer leurs connaissances, en traitant des informations multimédias.

     Depuis 2 années scolaires nous menons une réflexion autour de ce qu'on appelle maintenant les « Hyperdocuments Multimédias ». Nous reprenons la définition de Lévy : « L'hypermédia se comporte essentiellement comme un média, un support, un moyen de livraison et de représentation de l'information au même titre que le livre ou la vidéo. Il peut même favoriser l'écriture en collaboration, en améliorant la communication et en accélérant le processus d'écriture. »

     En termes d'hypermédias, les blocs peuvent être des textes, des images, des animations, des vidéos, des graphiques, des séquences sonores. La relation entre ces blocs structurés et des événements externes, comme la résolution d'un problème ou la quête d'informations dans un but pédagogique, leur fournit des capacités de sens adaptables aux tâches des apprenants.

UTILISATIONS DES HYPERDOCUMENTS

     Nous avons expérimenté, dans une première phase, avec les élèves de cycle 3, des hyperdocuments de ce type. Les élèves utilisent un ensemble de piles HyperCard, sur des thèmes disciplinaires de l'école élémentaire, et présentant des documents sur supports multimédias. Pour un compte-rendu plus complet voir les actes du 2ème colloque « Hypermédias et Apprentissage » publié par l'EPI.

     Notre objectif pédagogique n'est pas un objectif d'acquisition de connaissances dans une discipline. Nous posons le postulat que les élèves ont « des » connaissances diverses, scolaires et extra-scolaires. Par contre, nous posons en second postulat, qu'ils ont des difficultés à utiliser ces connaissances en situation. Le travail proposé doit leur permettre d'activer leurs connaissances dans une situation problème.

     Toutes les piles possèdent un programme-espion qui enregistre dans un fichier texte :

  • le temps total mis par l'équipe pour résoudre le problème ;

  • le temps de consultation de chaque carte portant une information-média ;

  • l'ensemble du parcours de navigation entre les cartes ;

  • les choix ou réponses données par l'équipe.

     Ces premiers travaux exploratoires nous ont permis de fixer quelques règles permettant de favoriser l'activité des élèves :

  • dans toutes les situations proposées, les équipes d'élèves peuvent se munir de crayon-papier pour prendre des notes et décharger ainsi leur mémoire de travail,

  • la pile doit être complètement auto-documentée : les élèves ne lisent pas les « règles du jeu » indépendantes et n'utilisent pas les boutons d'aide. Tout ce qui concerne l'utilisation technique doit être sur la carte,

  • la disposition des boutons ou des champs sur une carte induit la stratégie de consultation des documents. L'organisation de la carte est un élément déterminant ; son ergonomie doit être la plus constante possible entre les cartes, voire entre les piles,

  • les élèves sont très peu en mesure d'auto-évaluer les procédures qu'ils utilisent et leurs résultats, au moins lorsqu'ils ont à effectuer une tâche complexe : ils ont besoin d'être guidés, de bénéficier de feed-back,

  • un des problèmes clés des hypermédias est le parcours, ou plutôt la liberté de parcours que l'ordinateur va laisser à l'apprenant. Cette question est d'autant plus importante que l'on a des apprenants jeunes. Ce sont les difficultés de navigation dans un hypermédia qui se posent :

    • arriver à un endroit et ne plus savoir pourquoi on est là,

    • ne pas savoir s'il reste des documents pertinents dans le système,

    • oublier quelles sélections on a fait précédemment (les éléments consultés),

    • ne pas être capable de se représenter une vue d'ensemble ou un résumé cohérent de ce que l'on vient de voir (phénomène du « musée d'art »).

CONTRAINTES DE CONCEPTION

     De ces précédentes remarques nous nous sommes fixés des contraintes à respecter dans l'hyperdocument ENERGIE.

Environnement coopératif d'apprentissage

     Les situations de recherches proposées, le sont toujours à une équipe de 2 élèves. Nous souhaitons qu'il y ait discussion, confrontation et échanges. Le choix des cartes répondant au problème posé doit être l'objet d'un conflit dû à des « pensées parallèles » qui aboutiront à une compréhension mutuelle.

Micro-monde

     Il s'agit de limiter le champ d'investigation à un seul domaine, plutôt connu des enfants, si on veut développer des capacités métacognitives. D'autre part, les informations sont majoritairement véhiculées par des photos ou de la vidéo, donc proches de la réalité. Cette question de l'apprentissage par l'image est importante à notre époque où de nombreuses informations sont transmises sur de tels supports.

Réseau sémantique

     Tous les travaux antérieurs sur les hypermédias mettent l'accent sur les problèmes de navigation et les risques d'égarement des élèves dans la base de données. Plus les liens entre informations sont nombreux et plus ce risque est grand. Il est indispensable que les élèves aient un contrôle sur leur cheminement.

     Il est donc indispensable que les élèves sachent :

  • ce qu'ils ont à faire, retour au problème,
  • ce qu'ils ont déjà fait, état de leurs sélections,
  • leurs possibilités futures, les cartes non consultées.

Flexibilité

     Pour le maître, qui a le choix des problèmes à poser et qui récupère, en fin d'activité, une trace complète du parcours de l'équipe, en plus du résultat.

     Pour les élèves, qui sont dans un environnement ouvert, sans ordre préétabli, sans contrainte de temps et avec la possibilité de voir les documents autant de fois que le nécessite la négociation du conflit socio-cognitif avec le partenaire.

OPTION PÉDAGOGIQUE

     Nous pensons que plus l'élève est constructeur face à son problème, et plus les acquisitions sont structurées. Nous adhérons volontiers au modèle théorique de l'apprentissage développé par A. Giordan et qu'il nomme « modèle allostérique », modèle plutôt centré sur la transformation des conceptions initiales par l'élève.

     Le maître propose et organise un ensemble de confrontations en jouant sur diverses contraintes. L'élève essaie, cherche, confronte des documents et des situations, établit de nouvelles relations et modifie son réseau conceptuel. Le savoir est considéré comme un remaniement profond. On attache alors de l'importance aux sources multiples de documentation et au traitement de l'information ainsi recueillie.

     Les auteurs insistent sur quelques points clés :

  • l'apprentissage est rarement le fruit d'une simple transmission

  • apprendre, c'est être en difficulté par rapport à ses représentations initiales

  • apprendre, c'est une activité d'élaboration d'un sujet qui confronte les informations nouvelles et ses connaissances mobilisées et qui produit de nouvelles significations plus aptes à répondre aux interrogations qu'il se pose.

  • l'apprenant élabore un nouveau réseau conceptuel en reliant différemment les informations engrangées et il lui faut, pour cela :

    • des situations adaptées (questionnement, confrontations multiples)

    • des éléments significatifs (documentations, expérimentations)

    • certains formalismes restreints (symboles, schémas, graphes)

     En conclusion, les auteurs rappellent que c'est l'apprenant qui apprend et lui seul. Le maître, par contre, doit proposer un ensemble d'éléments, d'environnements didactiques pour favoriser cet apprentissage. Il lui faut fournir les repères, les ressources et les outils dont les apprenants ont besoin pour organiser les informations et produire du sens. Le maître est l'organisateur de l'environnement d'apprentissage.

DESCRIPTION DE L'HYPERDOCUMENT ÉNERGIE

     En tenant compte de ces divers paramètres, nous avons élaboré une nouvelle pile Hypercard sur le thème de l'énergie, et en particulier axée sur les concepts de réservoir et de convertisseur dans la chaîne énergétique. Nous avons fait le choix d'un concept complexe sans doute pour des enfants de 10 ans, mais indispensable pour la compréhension ultérieure des phénomènes physiques.

     L'hyperdocument ENERGIE est organisé en 4 parties :

  • le premier module (module de découverte) permet aux élèves de se familiariser avec la navigation dans l'hyperdocument,

  • le second module (module d'entrée dans la tâche) est une première approche du concept par une formalisation de la chaîne énergétique,

  • le troisième module (module de recherche) les amène à gérer une situation problème en consultant et sélectionnant un certain nombre de documents qui se trouvent dans une base documentaire,

  • le quatrième module enfin (module de décision) permet à l'équipe de contrôler et de valider son travail par rapport au problème posé.

     Un programme enregistreur permet de récupérer la totalité des actions de l'équipe et les différents temps d'exécution.

Module de découverte

     Son objectif est double. Dans un premier temps, il doit faciliter l'utilisation future de la pile. Il amène les élèves dans une pile exemple, basée sur un tout autre contenu (La presse), ne contenant que 5 cartes , et pour laquelle la consultation est totalement libre. C'est un temps d'exploration libre, sans contrainte et sans problème à résoudre. Nous pensons que ce module doit donner une autonomie suffisante aux élèves vis à vis de l'utilisation à venir.

     Ce problème d'utilisateur est très important, sans doute encore plus avec des enfants jeunes qui peinent beaucoup à avoir une représentation mentale de l'outil qu'on leur donne. La part de découverte libre dans ce module doit leur permettre de s'en faire une idée.

     Le second objectif de ce module est de faire découvrir aux élèves la structure de chaque document. En particulier ils doivent repérer que l'on peut accéder :

  • à un document particulier à partir d'une liste comprenant tous les titres des documents disponibles,

  • à une information complémentaire par l'utilisation des boutons de bas de page,

  • directement à une autre carte par le jeu des mots-clés présents dans la fenêtre.

     Ces deux objectifs n'ont sans doute pas été suffisamment atteints puisque beaucoup d'équipes d'élèves ont eu besoin, par la suite, de l'aide du maître. Dans notre prochain travail nous testerons un système permettant aux élèves à la fois de « voir fonctionner » en réalité la pile, avec un module automatique de démonstration, et d'agir sur cette pile en résolvant un mini-problème les amenant à utiliser les commandes vues précédemment en automatique.

Module d'entrée dans la tâche

     Son objectif est de centrer l'activité des élèves sur le concept de chaîne énergétique, en particulier les notions de réservoir et de convertisseur. Nous avons fait le choix d'une symbolisation dès le début de ce travail car elle permet de donner aux élèves une représentation claire et précise du phénomène physique à étudier, et de poser facilement une situation problème exigeant la recherche dans la base documentaire.

     Dans un premier temps une situation (pile-ampoule) est modélisée par le schéma complet de la chaîne énergétique.

     Puis, sur une autre situation (grille-pain), les élèves doivent reconstruire le schéma à leur tour, en 8 étapes guidées par la machine, en déplaçant des icônes.

     Enfin un problème de recherche leur est posé sous une forme identique à celle qu'ils viennent de travailler (un schéma).

Module de recherche

     C'est la partie base documentaire de l'hyperdocument. Construite à l'identique avec le module de découverte, une liste permet d'accéder à 40 documents, tous ayant trait à l'énergie.

     La situation consiste à sélectionner le (ou les) document qui répond au problème posé.

     Ex : dans le cas du problème 1, un seul document est accepté : le barrage par contre le problème 2 offre un choix plus large.

     La sélection se fait par un clic sur la légende du document qui passe alors en vidéo inverse, le titre apparaissant en gras dans la liste. Chaque document consulté apparaît en italique dans cette liste, ce qui permet aux élèves d'avoir un contrôle sur leurs actions précédentes. Ils peuvent ainsi repérer dans l'index général, les noms des cartes consultées et des cartes retenues (c'est à dire avoir un retour sur leurs choix dans la base).

     L'outil informatique permet une navigation souple et infinie dans les documents. Il doit permettre aussi aux élèves de savoir ce qu'ils ont déjà vu et ce qu'ils peuvent regarder encore. Nous avons beaucoup insisté sur cet aspect contrôle de la tâche par l'apprenant. Nous pensons même que l'outil devrait permettre encore un meilleur contrôle, par exemple avec une représentation graphique interactive du parcours, ce sera l'objet d'un développement futur.

Module de décision

     Enfin, un dernier module permet aux élèves de prendre une décision par rapport à leur travail. Ce module leur permet :

  • d'abandonner complètement le travail, sans validation,

  • de ne consulter que les cartes sélectionnées, permettant ainsi une vérification avant validation,

  • de retourner à la liste pour modifier une sélection ou ajouter un document,

  • d'annuler toutes les sélections pour recommencer au point de départ,

  • de demander la validation par l'ordinateur.

     Ce module de validation est accessible à partir de n'importe quelle carte de la base documentaire. Il nous a semblé important que les élèves puissent changer de point de vue, passer de acteur à évaluateur, avoir un retour sur l'état d'avancement de leur réponse par rapport à la question posée.

RÉSULTATS EXPÉRIMENTAUX

Recueil des données

     Nous avons choisi d'expérimenter l'hyperdocument ENERGIE dans une classe de CM2, au mois de mai (âges 10 - 11 ans), donc avec des élèves qui ont déjà quelques notions sur l'énergie (au programme du Cours Moyen) mais qui n'ont pas encore traité le sujet en classe. D'autre part, la classe choisie travaille sur ordinateur pour produire un journal, ce qui atténue les problèmes de manipulation de la machine. Deux Mac LC sont utilisables conjointement pour l'expérience, dans une autre pièce que la salle de classe.

Sujets

     La classe est composée de 25 élèves, sans problèmes spécifiques, la maîtresse jugeant le groupe comme « moyen », avec des forts et des faibles, mais tous étant proposés pour un passage en 6ème de collège. Le groupe classe est partagé en 2 sous-groupes, l'un travaillant sur les ordinateurs (groupe expérimental : 12 élèves), l'autre non (groupe témoin : 13 élèves). La maîtresse a été chargée de la répartition en tenant compte des niveaux scolaires pour que les groupes soient équivalents. Les élèves du groupe expérimental ont ensuite été groupés par équipes de 2, toujours par la maîtresse en associant des élèves de même niveau scolaire.

     Nous souhaitions ainsi :

  • vérifier les acquisitions produites par l'utilisation de l'hyperdocument ENERGIE en comparant les résultats du groupe expérimental vs le groupe témoin,

  • observer si les résultats du groupe expérimental étaient corrélés au niveau scolaire des élèves.

Procédure

     Dans un premier temps nous avons proposé, à toute la classe, un questionnaire écrit servant de pré-test pour évaluer les connaissances initiales des élèves sur l'énergie, et vérifier que les 2 groupes n'étaient pas contrastés.

     Une semaine après, le groupe témoin a travaillé sur l'hyperdocument ENERGIE. Deux équipes ont travaillé simultanément sur les 2 postes, 3 rotations ont été nécessaires. La consigne de ne rien dire aux camarades de la classe semble avoir bien été respectée.

     Enfin, la semaine suivante, un deuxième questionnaire écrit a été soumis à toute la classe, post-test servant à évaluer les effets du travail sur machine.

Résultats

Pré-test

     Le questionnaire écrit est une évaluation des connaissances générales des élèves sur l'énergie et particulièrement sur ses différentes formes. Les élèves ont à répondre à 14 questions.

     On constate une moyenne satisfaisante de réponses justes : 70 % pour la classe entière et 70,8 % pour le groupe expérimental que l'on peut donc considérer comme représentatif. On note un moins bon taux de réponses justes pour 4 questions qui demandent une réponse de synthèse à partir de plusieurs situations :

situations

taux de réponses justes

3 ensembles d'images d'objets utilisant des sources d'énergie différentes (vent, moteur, eau)

0.68

2 moulins (eau, vent) entraînant une roue

0.64

2 situations vie courante montrant une dépense physique d'énergie

0.68

3 situations montrant l'alimentation comme source d'énergie

0.64

     La dernière question est une synthèse de l'ensemble des documents proposés auxquels il faut associer un seul mot pris dans une liste :

mots proposés

groupe classe

groupe expérimental

électricité

0.00

0.00

force

0.08

0.08

mouvement

0.00

0.00

énergie

0.56

0.75

nourriture

0.04

0.00

vitesse

0.00

0.00

puissance

0.32

0.17

Travail sur machine

     Dans le module d'entrée, nous avons relevé le parcours de reconstitution du schéma du grille-pain et les étapes qui entraînent le plus d'hésitations du type essais-erreurs. Parmi les 8 phases, les erreurs sont les plus fréquentes dans les :

  • phase 1 ; peut-être dues à une mauvaise compréhension de la tâche puisque le programme impose de ne répondre que pour une seule case du schéma qui n'est sans doute pas celle que choisiraient les élèves en toute autonomie.

  • phase 4 ; dues à une non-isomorphie avec le schéma exemple qui ne possède qu'un seul réservoir terminal (la pièce) alors que le grille-pain en a deux (la pièce, le pain).

  • phase 5 ; dues au changement de niveau de réponse puisqu'après avoir utilisé la symbolisation dans les phases précédentes, il faut nommer les objets.

     La moyenne des temps de reconstruction du schéma est de 13 min 30, avec un minima à 8 min 29, et un maxima à 17 min 14. Toutes les équipes reconstruisent le schéma.

     Dans le module de recherche, le problème 1 demandait une unique réponse (le barrage) pouvant correspondre au schéma proposé :

eau

mouvement --->

CONVERTISSEUR

---> électricité

     Nous avons relevé :

  • le temps de 1 ère lecture, c'est à dire le temps de balayage de la liste avant de choisir le premier document à consulter (lect),

  • le nombre de documents différents consultés (cons),

  • le nombre de documents secondaires consultés, ceux qui ne sont accessibles que par un bouton sur la carte et qui donnent des informations complémentaires (cart2),

  • le nombre de retour au problème (pb),

  • le nombre de documents sélectionnés, c'est à dire le nombre d'erreurs s'il y a eu plus de 1 sélection (sel),

  • le temps total de résolution du problème (tps)

  • les noms des documents sélectionnés,

 

lect (s)

cons

cart2

pb

sel

tps (min:s)

moy

35

12

1

4

3

24:11

min

9

2

0

2

1

15:14

max

46

22

4

7

6

30:44

documents sélectionnés :
     barrage (9 fois)
     turbine hydraulique (3)
     moulin à eau (3)
     turbine (3)
     centrale nucléaire (2)
     bateau à vapeur (1)
     centrale thermique (1)
     pollution (1)
     alternateur (1).

     Par la suite, et toujours dans le module de recherche, le problème 2 demandait plusieurs réponses pouvant correspondre au schéma proposé :

mouvement --->

CONVERTISSEUR

---> électricité

     Des problèmes organisationnels ayant perturbé le déroulement de cette deuxième partie, nous n'avons fait que des relevés indicatifs sur les mêmes variables que pour le problème 1. De façon générale on doit cependant noter une nette diminution des valeurs moyennes relevées, et ceci pour toutes les variables concernées. On peut supposer un double effet d'apprentissage, dans la navigation dans l'hyperdocument d'une part, dans les contenus notionnels des documents d'autre part. Cette hypothèse est à vérifier de façon plus précise.

Post-test

     Le questionnaire écrit est une évaluation centrée sur les concepts de réservoir et de convertisseur et leur schématisation, et très dépendant des situations rencontrées dans le travail sur machine, c'est à dire pile-ampoule, grille-pain, barrage. Les élèves devaient répondre à 19 questions réparties dans 6 domaines.

moyenne
rép. justes

pile-ampoule

grille-pain

schéma g-p

barrage

schéma b

gr. expé

0.75

0.92

0.50

0.85

0.42

gr. témoin

0.42

0.71

0.36

0.77

0.37

     On note des scores moyens supérieurs pour le groupe expérimental, ce qui laisse supposer qu'une acquisition de connaissances a bien été réalisée. Les questions utilisant la schématisation entraînent des scores plus faibles, dans les 2 groupes ; la formalisation de la chaîne énergétique est sans doute limite pour des enfants de 10-11 ans.

     Le 6ème domaine était centré sur des convertisseurs à trouver, autres que ceux rencontrés dans l'hyperdocument : moteur électrique, centrale thermique, centrale solaire, radiateur électrique.

     Les résultats ne montrent pas de différences significatives entre les deux groupes, bien que le groupe expérimental donne un peu plus de bonnes réponses. Nous avons relevé de façon générale des scores très faibles dans cette série, sauf en ce qui concerne le radiateur électrique et la centrale solaire qui semblent être bien connus des élèves.

     Un phénomène intéressant est apparu en comparant les réponses justes, fausses ou non-réponses des 2 groupes. Voici les scores sur 60 (5 questions, 12 élèves)

 

justes

faux

non-réponses

gr. expé

14

31

15

gr. témoin

12

15

33

     Le groupe expérimental donne plus de réponses fausses et moins de non-réponses que le groupe témoin. Serait-ce un effet pervers d'une trop grande confiance en soi après le passage sur machine, une perception de supériorité vis à vis des autres et/ou du domaine de connaissances ?

Discussion

À propos de l'hyperdocument

     Le module de découverte n'a pas rempli complètement son rôle puisque les élèves n'étaient pas autonomes. Il est très difficile de tenir un juste milieu entre une description complète de toutes les fonctionnalités de l'hyperdocument et des cartes qui ne soient pas trop chargées et qui restent lisibles. Sans doute faut-il une phase d'appropriation plus importante, avec un module de présentation automatique et un module d'entraînement. Ce temps d'appropriation diminue d'ailleurs lors du travail sur la 2ème situation problème. On devrait pouvoir constater ce bénéfice par une utilisation fréquente de l'hyperdocument.

     Autre problème important, celui de la structure de l'information présentée. On constate par exemple que les cartes complémentaires sont peu fréquemment consultées et que le système des mots-clés n'a pas du tout été compris par les élèves. Un travail est à conduire dans cette direction. Il est nécessaire de faire comprendre aux élèves que l'information sur un domaine peut être répartie à plusieurs endroits et que c'est la consultation de ces différents « lieux » d'information qui permet de répondre au problème. D'autre part, il est nécessaire qu'ils comprennent que plusieurs documents peuvent être liés par le même concept. Sans doute faudra-t-il passer par une étape de construction d'une mini-base documentaire dans laquelle les élèves devront organiser eux-mêmes les documents. Ce travail de hiérarchisation documentaire, avec catégorisation et inclusion de l'information, sera un axe dominant de notre future recherche.

     Un autre point important concerne le module de décision. Pour que cette décision soit le résultat d'une activité cognitive, il faut que les élèves puissent contrôler la tâche qu'ils réalisent. Nous pensons que tous les dispositifs permettant aux élèves de suivre leur progression et de l'auto-réguler doivent améliorer les acquisitions. Sans doute faudra-t-il envisager une représentation graphique de ce parcours pour des enfants de 10-11 ans, avec possibilité de modification du trajet et des noeuds d'information, à partir de la trace elle-même.

À propos des acquisitions

     Le choix d'une représentation formelle de la chaîne énergétique est sans doute limite avec nos élèves. Il faudrait certainement que les élèves aient plus de liberté dans la reconstruction du schéma, la guidance, qui était très forte ici, a plutôt été un obstacle.

     La recherche dans la base documentaire fournit des informations intéressantes. De façon générale, les élèves prennent le temps de parcourir la liste des documents avant d'aller en consulter un (temps moyen de lecture de la liste : 35 s). Ils ont bien en tête le problème qui leur a été posé et vont faire un premier choix en fonction du titre des documents, d'où l'importance du titre qui apparaît dans cette liste et des associations que peuvent faire les élèves. Par exemple dans le problème 1 où apparaissait le mot « eau », 3 équipes sont aller consulter « le moulin à eau ».

     La navigation dans la base semble cependant bien ciblée. La moyenne de 12 cartes consultées ne montre pas un trop grand éparpillement, de même que les cartes sélectionnées ont toutes un rapport avec le thème du problème. On constate cependant de fréquents retours au problème (4 fois en moyenne). Les élèves ont besoin de ce retour pour prendre de nouvelles décisions de recherche dans la base.

     Enfin, nous n'avons pas noté de corrélation significative entre les résultats après le travail sur machine et le niveau scolaire des équipes. Il semble que les documents proposés soit suffisamment du domaine des connaissances générales pour que chacun puisse s'impliquer sans crainte de l'évaluation scolaire. Cette attitude semble fortement conditionnée par le fait que les documents proposés sous forme multimédia sont des images de la réalité qui permettent à chacun de prendre ses indices de reconnaissances là où il les prend d'habitude dans la vie courante. Ce point nous parait fondamental et ouvre des axes de recherche intéressants pour l'utilisation des hyperdocuments multimédia à l'école primaire.

PARTENAIRES

     Ce travail a été réalisé en collaboration avec :

  • Madame Andrée Tiberghien, directeur de recherche du laboratoire COAST-CNRS à l'École Normale Supérieure de Lyon

  • Madame Sylviane Rolland, professeur de physique à Lyon

  • Madame Éliane Corre et ses élèves de l'école M. Dormoy de Bellerive-sur-Allier

  • La MAFPEN de Clermont-Ferrand

Guy Petitot
Inspection Éducation Nationale Vichy II
rue Jean Macé
03700 - Bellerive-sur-Allier

Paru dans la  Revue de l'EPI  n° 77 de mars 1995.
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