ÉDITORIAL
 

     Le Conseil National des Programmes vient de rendre publique une déclaration sur « Les ordinateurs au service du système éducatif », dont nous publions en rubrique « Documents » les six principes et neuf propositions.

     Plusieurs de ces propositions et de nombreux points de la déclaration rejoignent ce que l'EPI demande avec force depuis des années et que nous avions rassemblé dans le texte « Pour le développement de l'informatique pédagogique dans le système éducatif » [1], approuvé par l'Assemblée générale de l'association réunie le 20 octobre 1990.

     Cette déclaration [2] intervient après une longue phase de concertation à laquelle l'EPI a activement participé en apportant de nombreuses contributions. Plusieurs ont été reprises, et nous nous en félicitons ; nous restons néanmoins en désaccord sur deux points essentiels : le rôle du service public et la nécessité d'un enseignement de culture générale en informatique [3].

     Mais cette déclaration a déjà un mérite, celui d'exister et d'attirer l'attention des responsables sur l'importance de l'informatique pour le système éducatif. Dans un long texte de vingt six pages, pas toujours homogène et non exempt de contradictions, nous relevons de nombreux passages positifs qu'il nous serait difficile de renier.

     Ainsi, « ... le métier d'enseignant et le système éducatif ne peuvent rester à l'écart d'une évolution déterminante pour l'avenir des jeunes... », « ... il s'agit donc de donner à tous les élèves une formation qui les rende capables d'utiliser sans difficulté les outils informatiques... », « ce sont les besoins du système éducatif qui doivent orienter les choix techniques et non l'inverse. »

     Ou encore, la nécessité « ... d'un plan pluriannuel cohérent, fondé sur la durée et la continuité... », ou celle « d'élaborer un plan qui, dans la perspective d'une généralisation progressive de l'utilisation des outils informatiques, définisse nationalement : les objectifs à atteindre par les élèves et les modalités d'évaluation associées ; la façon dont les formations initiale et continue des maîtres doivent les intégrer ; enfin une politique d'équipement des établissements ».

     Dans le chapitre formation initiale et continue des enseignants, « les enseignants de toutes les disciplines doivent être formés de façon différenciée à l'utilisation de l'ordinateur... La capacité à utiliser l'ordinateur dans les apprentissages disciplinaires doit être intégrée à l'évaluation terminale... La maîtrise de l'outil informatique par l'enseignant devant sa classe implique une formation pratique et théorique... Il est nécessaire de définir, pour chaque discipline, le noyau de connaissances (informatiques) indispensables... La formation continue des personnels doit suivre les mêmes orientations... » Cela va sans dire, mais cela va mieux en le disant... et surtout en le faisant.

     À propos des programmes, « ... tous les Groupes Techniques Disciplinaires doivent donc réfléchir aux transformations induites dans leur discipline... Tous les programmes doivent, dans un avenir proche, être conformes à la charte » ; il y a là comme une incantation, car malheureusement, à l'heure où nous écrivons, trop de ces programmes en sont encore loin. C'est ici le talon d'Achille du texte du CNP.

     À propos de logiciels, « ... la création de logiciels de qualité reste donc un problème d'actualité... Il est souhaitable que les équipes élaborent les cahiers des charges pour la création ou la modification de logiciels disciplinaires... (équipes) impulsées et soutenues par le système éducatif (aux plans national et académiques). » Nous aurions souhaité que le CNP aille plus loin dans l'affirmation du rôle du service public, mais le souffle ne passe plus. Il y a néanmoins la demande qu'un bilan des actions menées soit fait par des personnalités extérieures qui tend à faire penser que le système actuel n'est pas efficace (demande non reprise dans les neuf propositions).

     A propos des équipements, et notamment des réseaux, nous avons relevé avec satisfaction que le CNP prône l'assistance technique et pédagogique des enseignants « qu'implique une utilisation efficace de l'outil ».

     Notre différent essentiel porte toujours sur l'enseignement de culture générale en informatique. Sur le fond, après bien des hésitations qui ont laissé des traces dans le texte, le CNP reconnaît que l'utilisation intelligente de l'ordinateur demande des connaissances précises de nature informatique (cela se traduit par le principe n° 3, cf. Documents). Il va même jusqu'à admettre que « ... pour certaines disciplines, des pratiques de programmation ont néanmoins leur place avant le baccalauréat ». Mais il refuse un espace d'enseignement autre que « disciplinaire ». Dans la terminologie du CNP, « disciplinaire » fait référence à toutes les disciplines sauf l'informatique, qui ne peut en être une, ni dans l'enseignement général secondaire, ni a fortiori dans l'enseignement primaire (page 2 alinéa 3). Reconnaissons néanmoins que la proposition 4 introduit la possibilité de « séances interdisciplinaires (qui) pourront être organisées lorsque ce sera utile ».

     Pour ce qui concerne l'option informatique, le CNP persiste et signe ; même si, ici ou là, on entend dire que l'O.I. aurait pu être améliorée et que les Ateliers de pratique, après tout, auraient pu se retrouver au rang d'option.

     Le débat [4] n'aurait-il pas été, quelque part, escamoté ?

     L'EPI considère qu'il est toujours ouvert. Dans cet esprit, la dernière Assemblée générale, après consultation de l'ensemble des adhérents, a approuvé le texte « Pour une culture générale en informatique à l'école, au collège et au lycée ». Nous le publions en rubrique « Documents » comme une nouvelle contribution à la réflexion collective.

Paris, le 21-11-1992

Jacques LUCY
Jacques BAUDÉ

Paru dans la  Revue de l'EPI  n° 68 de décembre 1992.
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NOTES

[1]- texte publié dans le Bulletin EPI n° 60. Voir le résumé dans la rubrique « Documents » de ce Bulletin n° 68.

[2]- les adhérents de l'EPI intéressés peuvent la recevoir en envoyant, 13 rue du Jura, une enveloppe 16x23 timbrée à 4 F et portant leur adresse.

[3]- voir le texte approuvé par l'Assemblée générale de l'EPI 1992 en rubrique « Documents ».

[4]- voir :
Bulletin EPI n° 67, p. 29 à 37, note du GTD informatique ;
Actes du colloque INRP -> atelier « Quelles compétences transversales ? » (voir en page 98 de ce Bulletin n° 68).

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