UN EXEMPLE DE CYBERENSEIGNEMENT EN CHIMIE

Marie-Paule BASSEZ

 

Résumé

Cet article décrit la création d'un centre serveur sous le système d'exploitation Linux , avec le serveur web Apache, ainsi que le développement d'un site pour le cyberenseignement en chimie.

INTRODUCTION

Le but était d'utiliser les sciences et technologies de l'information et de la communication dans l'enseignement. L'auteur a donc ouvert le serveur ChemPhys (Chemical Physics) le 5 octobre 1998 avec le système d'exploitation Linux, le serveur Apache, et ses fonds personnels. L'adresse URL est : http://chemphys.u-strasbg.fr ou tout simplement : go.to/chimie

1. RÉALISATION D'UN SERVEUR DE SITES WEB

La première version du serveur web fut mise en œuvre sur une machine de type PC dotée d'un microprocesseur 32 bits AMD-K6 200 MHz (http://www.amd.com) avec un disque dur de 6,4 Go, 64 Mo de mémoire vive et du matériel compatible Linux, dont une carte graphique S3 Trio 64V+. Le système d'exploitation Linux (http://www.linux.org), multi-tâches et multi-utilisateurs, logiciel libre gratuit (http://www.aful.org) fut celui d'une distribution Slackware et le noyau 2.2.1 adapté à la configuration matérielle fut compilé. Le serveur web Apache (http://www.apache.org), dont le code source est également libre, fut choisi comme logiciel de serveur HTTP (HyperText Transfer Protocol). Ce serveur de qualité supérieure aux offres commerciales, fut dernièrement porté par IBM sur Windows NT. Les pages du site furent écrites directement en langage HTML.

Grâce aux logiciels libres et au langage HTML, il a été possible de monter un centre serveur et un site web à moindre coût. Une solution basée sur les produits Microsoft aurait conduit à l'achat d'une licence de serveur Windows NT, à l'achat d'un serveur web commercial et à l'achat de logiciels spécialisés d'édition sous Windows, sans compter les mises à jour.

Depuis septembre 1999, la machine du serveur web est maintenant une machine bi-processeur. Le système d'exploitation, toujours Linux, fut d'abord celui de la distribution Red Hat 6.0, puis celui de la distribution Mandrake 7 depuis juin 2000. C'est un système SMP (Symmetric MultiProcessing), qui exploite le parallélisme entre les deux processeurs. La machine est construite autour de la carte mère ABIT BP6 qui permet d'utiliser deux microprocesseurs Céléron en contournant le bridage d'Intel qui empêche le SMP. De plus les processeurs 400 MHz ont pu être légèrement surcadencés (overclockés) à 450 MHz. Une carte Ethernet 3COM permet une interface réseau performante grâce au Bus Mastering. Les capacités de la machine sont très amplement suffisantes pour le trafic du site "Chimie-Physique" et celui du site "Science et Droit" hébergé. J.-P. Baud professeur de droit à Paris-X y présente selon ses propres termes "une formation assistée par Internet", sur "l'Histoire de l'Administration Publique" et "l'Histoire du Droit". L'adresse URL de ce dernier site est : http://chemphys.u-strasbg.fr/~baud/droit-science/index.html. Ou tout simplement : fly.to/droit.

2. CYBERENSEIGNEMENT

2.1 Compléments pédagogiques

Le site "chimie-physique" a débuté avec des compléments de cours, sous forme de concepts théoriques, d'applications, d'exercices, de simulation de travaux pratiques et d'expériences. Des liens ont été créés vers des documents multimédia déjà développés, essentiellement en langue anglaise et sélectionnés pour le niveau de connaissance des étudiants. Un technicien de l'IUT en 1998 et un étudiant lors d'un projet tutoré en 1999, ont contribué à la recherche de sites pertinents. Un enseignement en amphi a été réalisé en utilisant ces sites distants. Dans la mesure où ils ont accès à un ordinateur connecté sur Internet, les étudiants peuvent compléter leurs cours à distance.

2.2 Cyberlivre : "la chimie professionnelle"

Dans le cadre des projets tutorés 2000, quatre étudiants ont écrit des pages sur la préparation à leurs stages professionnels en entreprises et laboratoires. Ils ont choisi d'utiliser leur ordinateur personnel et un éditeur de pages web, pour préparer le texte puis l'enregistrer sur cédérom ou disquette et le transférer sur le site. L'un d'entre eux a créé des liens vers des sites d'entreprises et laboratoires alsaciens et vers leurs pages sur les offres d'emplois. Un autre étudiant a choisi d'écrire son texte directement en langage hypertexte balisé, avec l'éditeur de Linux, sur le serveur chemphys. Mais tous apprennent à construire un hypertexte multimédia en couleur, avec des graphiques, des tableaux et des images si possible animées, c'est-à-dire tout ce qui diffère d'un texte imprimé sur papier. Chaque étudiant contribue ainsi à écrire un chapitre d'un cyberlivre sur la chimie professionnelle.

2.3 Communication interactive

La communication interactive avec les étudiants se fait évidemment oralement mais aussi par courrier électronique, avec les quelques étudiants qui possèdent une connexion Internet privée. Les 16 (sur 81) étudiants de 2ème année qui ont un accès personnel au réseau communiquent également entre eux dans le but d'un apprentissage coopératif. Dans le cadre de leurs projets tutorés, ils utilisent également la messagerie électronique pour communiquer avec l'entreprise.

2.4 La recherche au service de l'enseignement

Certains travaux de recherche de l'auteur présentés sur la toile servent à illustrer des parties du programme pédagogique. Par exemple les visualisations en gif animé de divers modes de vibrations intermoléculaires du dimère de l'ammoniac, servent à illustrer la spectroscopie infra-rouge, expliquée "en ligne" en amphi, avec projections des pages concernées sur grand écran (http://chemphys.u-strasbg.fr/~mpb/papers/eccc5A/plan.html). Ce qui montre bien l'indissociabilité recherche-enseignement.

2.5 Notoriété

A l'origine, le site chimie-physique a été construit tout simplement avec l'objectif d'utiliser Internet et la toile pour effectuer des compléments de cours et de la recherche scientifique en réseau. Il faut toutefois remarquer que certaines pages sont bien référencées par les moteurs de recherche (par ex. http://www.altavista.com) sans démarche particulière de la part de l'auteur pour leur soumettre le site. On estime que seulement 25% des 80 millions de sites WWW sont référencés. Ce bon référencement des pages du site chimie-physique est peut-être dû à la mise en œuvre relativement précoce du serveur, à une époque où les moteurs de recherche arrivaient à visiter 80% des sites existants. Avec une attitude positive, il semble que ce soit un capital de notoriété qui est attachée à l'adresse URL du serveur.

3. COMMUNICATION SCIENTIFIQUE ET PÉDAGOGIQUE

Le serveur ChemPhys a participé au cyberréseau de la Semaine de la Science, en octobre 1999, organisée sur le thème de "La Science en Réseau".

CONCLUSION

Le choix de Linux fut judicieux et précurseur. C'est un système qui s'est montré stable et fiable et qui de surcroît est gratuit ou peu coûteux. Le serveur fut ouvert sur la toile le 5 octobre 1998 et le 28 octobre de cette même année, un accord était signé entre le ministère de l'Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie représenté par le Directeur de la Technologie, Pascal Colombani et l'Association Francophone des Utilisateurs de Linux et des Logiciels Libres représenté par son président Stéfane Fermigier (http://www.aful.org/education/accord.html).

Le ministère de la Culture a récemment préféré Linux comme système d'exploitation de son serveur central, et informe que progressivement, les 200 machines serveurs de l'administration centrale adopteront ce logiciel libre. A une échelle plus modeste, un serveur Linux va bientôt être installé à l'IUT et des projets concernant les technologies de l'information et de la communication appliquées à l'enseignement s'élaborent.

L'université française souffre d'une structure particulièrement conservatrice au niveau du "middle management" ou de la direction administrative intermédiaire. On peut constater d'un part, au plus haut niveau de l'état, une prise de conscience du retard et des déclarations en faveur des technologies nouvelles, et d'autre part, un effort d'enseignants qui partagent la même analyse. Comme le dit très justement Alain Giffard, conseiller technique chargé des technologies de l'information : "Internet a profondément modifié les règles hiérarchiques liées aux échanges d'information... avoir un développement Internet qui se fait dans une situation de dépendance structurelle technologique n'a pas de sens" (http://web2.latribune.fr éd. du 09/02/2000). La démarche pédagogique présentée ici est l'illustration même de ces propos.

Marie-Paule BASSEZ

Département chimie
Université Robert Schuman
I.U.T. de Strasbourg-sud

72, route du Rhin

67400 ILLKIRCH

Remerciements

L'auteur remercie Francis Muguet pour son aide efficace, à la fois pour la mise en œuvre de la distribution Linux dans la première version du serveur, et pour l'assemblage composant par composant du bi-processeur BP6 de la deuxième machine.

Paru dans la Revue de l'EPI  n° 99 de Septembre 2000.
Vous pouvez télécharger cet article au format .pdf (129 Ko).

 

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(16 novembre 2000)